Livres de mars – avril 2024

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STUPEUR

Zeruya SHALEV

Traduit de l’hébreu par Laurence SENDROWICZ,

Gallimard, 363 pages

Au chevet de son père mourant, Atara recueille les propos confus de cet homme sévère, qui l’appelle tendrement Rachel, du nom de sa mystérieuse première épouse.

Atara retrouve la trace de cette femme de 90 ans qui vit seule dans le désert de Judée. Elle force presque sa porte et réveille chez elle un douloureux passé : la lutte armée clandestine dans le groupe sioniste le « Lehi » et la résistance contre les Anglais en 1947- 48, avant la fondation de l’Etat d’Israël. La rencontre de ces deux femmes bouleversera leur existence.

En 18 chapitres, passant en alternance d’une femme à l’autre, l’écrivaine – une des voix majeures de la littérature israélienne, qui fut grièvement blessée en 2004 dans un attentat – sonde l’âme humaine, montre combien l’histoire collective bouscule les liens privés.   

Ce roman dense et puissant interroge le couple, la parentalité, la culpabilité, la religion, les silences des familles qui régissent les vies, et met en exergue les tensions et violences au coeur de la société israélienne.

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TURBULENCES 

Eshkol NEVO

Traduit de l’hébreu par Jean-Luc ALLOUCHE

GALLIMARD, 336 pages

Trois histoires d’amour s’entrecroisent pour fouiller les relations humaines dans une société Israélienne mise à nue.

L’auteur a conçu son roman comme un thriller qui vous tient en haleine et vous empêche d’interrompre votre lecture.

Un couple de jeunes mariés sont en Bolivie pour leur voyage de noces et rencontre un Israélien récemment divorcé et en vacances pour quelques jours.

L’histoire pourrait s’arrêter là mais ….un coup de foudre entre la jeune mariée et le touriste va éclater et  le mari va mourir sur la route de la mort .

S’est il suicidé ? l’a t on poussé ? et qui bien sûr ?

Un médecin – chef d’un hôpital de Tel Aviv veuf se sent étrangement proche d’une jeune interne de son service jusqu’à  à éprouver le besoin de la protéger mais la réaction de la jeune femme sera ….a vous de la découvrir.

Un couple apparemment uni à l’habitude de se promener le samedi dans un verger mais quand l’homme entre dans le jardin pour un instant il disparaît sans laisser de traces . Nevo en profite pour disséquer le couple dans sa vie la plus intime et leurs relations complexes.

N’hésitez plus plongez vous dans ce livre écrit par un conteur exceptionnel qui offre un portrait de la société israélienne.

C’est vraisemblablement un roman parfait.

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LE MIME MARCEAU, SA COUSINE ROSE, LE YIDDISH ET MOI.

Carol MANN

L’Originel, 187 pages

Carol Mann reconstitue l’histoire familiale et les périples des uns et des autres, de la ville polonaise de Bedzin à Strasbourg, en passant par Karlsruhe. Elle décrit la diversité de la communauté juive strasbourgeoise d’avant-guerre, où « fusaient comme autant de feux d’artifice », une multitude de langues avec le yiddish en tête et en dénominateur commun. Et le cousin germain de sa mère Rose, le mime Marceau, est le fruit de tout cela : on le découvre sous un autre jour et l’on comprend mieux son personnage de « Bip ».  On apprend comment, à huit ans, il fonde sa première troupe d’enfants,  et comment adolescent, en pleine guerre, il s’occupe de l’animation théâtrale dans un château où l’OSE héberge des enfants juifs de parents déportés:  chargé de convoyer une trentaine d’enfants vers la Suisse, le futur mime exercera alors, « pour la première fois, ses talents de comédien silencieux, en vérité mime sans le savoir, pour distraire les enfants sans émettre le moindre bruit qui eut pu éveiller des attentions malveillantes.».

La guerre disséminera, à travers la France la famille qui n’en sortira pas indemne : arrêté, en plein hiver, dans sa boucherie de Villeurbanne, le père de Marcel Marceau sera déporté à Auschwitz.

Le silence du mime fut peut-être aussi celui de la sidération.

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FIGURES DU JOUR

1930

&

MANNEQUINS

1934

Debora VOGEL (auteur), Batia BAUM  (traductrice)

Edition bilingue Français-Yiddish

La Barque, 266 pages

« Je comprends mes poèmes comme une tentative de nouveau style en poésie, je trouve en eux une analogie avec la peinture moderne », écrivit Debora Vogel, dans sa préface à Figures du jour. Ses poèmes sont effectivement  des tableaux, mais peints mais avec des mots, non avec des pinceaux : couleurs et formes géométriques allégorisent ses pensées. Grande figure de l’Avant-Garde  polonaise et yiddish –littéraire et artistique-, c’est âgée d’une vingtaine d’années que cette poétesse apprit le yiddish, la langue originale des poèmes contenus dans ce recueil bilingue et issus de ses deux premières publications. Son regard réaliste percevait tant les vains artifices que la monotonie froide et intemporelle du monde urbain dont elle n’était pas dupe. Paris, à laquelle elle consacra plusieurs poèmes, n’était ainsi qu’une « ville de pacotille bariolée » (« shtot fun bunt-farbikn shund »). Et elle considérait les tristesses comme « un élément décoratif de la vie ».

Au-delà de la fidélité de la traduction, Batia Baum, avec toute sa sensibilité, a parfaitement respecté la musicalité des poèmes dont l’élégante fluidité se retrouve dans les deux versions, yiddish et française.

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LA MAISON AU BORD DU CANAL – L’histoire de la maison d’Anne Frank

Thomas Harding  (auteur) et Britta Teckentrup (illustratrice)

La Partie, 56 pages

Initialement publié en Allemagne, ce livre superbement illustré et destiné aux enfants, raconte chronologiquement, en quelques pages,  près de 400 ans d’histoire d’une maison d’Amsterdam et de ses différents habitants, parmi lesquels Anne Frank pendant la guerre. Cette précision figure dans le sous-titre du livre, puis dans un court préambule, et à la fin, dans les deux dernières pages qui révèlent les identités de tous les habitants de cette maison (ce qui atteste ainsi de la véracité  des histoires relatées).

En revanche, pour que tout enfant s’identifie à Anne Frank, nulle part, dans le corps du texte, ne sont mentionnés ni le nom d’Anne Frank, ni les mots « Juifs » ou « Nazis » : « En un jour d’été caniculaire, des policiers accompagnés d’un soldat pénétrèrent dans la maison et montèrent d’un pas lourd l’escalier dissimulé.  Les hommes découvrirent la jeune fille, sa famille et leurs amis. Ils les arrêtèrent et les embarquèrent ».

Ce livre relève ainsi le défi de permettre à des enfants d’aborder, en douceur, l’histoire d’Anne Frank.

Livres recommandés en janv – fév 2024

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LA VENGEANCE DE FANNY

Yaniv Iczkovits

Gallimard, 509 pages  

Traduit de l’hébreu par Jérémie ALLOUCH

Lauréat du prix AGNON

Dans un shtetl de l’Empire russe, à la fin du 19e siècle, Mendé, épouse et mère de famille, est désespérée par le départ de son mari pour la grande ville de Minsk. Sa sœur Fanny – dite di wilde khayeh (la bête sauvage), car fille de boucher elle manie divinement le couteau – entreprend de retrouver son coquin de beau-frère : elle laisse mari et enfants au milieu de la nuit, passe le fleuve sur la barque de Zizek le taiseux, qui l’accompagnera dans son périple.

Commence une aventure menée à un rythme endiablé, où se croisent malfrats, marginaux, aubergistes, prostituées, soldats ; les fuyards seront poursuivis par la police secrète du tsar.

L’auteur construit une épopée haletante aux personnages drôles et touchants. Avec humour, ce récit parsemé de mots yiddish dépeint une héroïne intrépide, maligne, bravant tous les dangers, tout en restant sensible et humaine.

Au passage injustices et situations absurdes sont dénoncées : misère, violences antisémites, despotisme, procès tronqués, garçons juifs enlevés pour être enrôlés dans l’armée, épouses abandonnées sans le get – l’acte de divorce religieux sans lequel elles ne peuvent se remarier…

L’éclatant talent de conteur d’Iczkovits, né en 1975, rappelle de grands romans de la littérature : les héros picaresques de Rabelais et de Cervantes, ceux pleins de verve de Mark Twain, de Sholem Aleykhem ou I. B. Singer. Mais changement d’époque avec une héroïne au centre de cette odyssée !

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JUIFS EN POLOGNE – Quand la Pologne a cessé d’être une terre d’accueil 

Alexandra Subrémon

Le Bord de l’Eau, 210 pages

Préface Audrey Kichelewski; Postface Konstanty Gebert

Dans ce récit se croisent deux histoires : celle des parents de l’auteure – un jeune couple qui parvient à s’échapper du ghetto de Varsovie, est déporté dans un camp de travail en Allemagne, et en 1945 revient à Varsovie, croyant à un avenir meilleur dans la Pologne communiste – , et l’histoire propre de l’auteure, née en 1947 à Strasbourg où sa mère est quelque temps employée au consulat de Pologne, à qui on n’a rien dit de ses origines juives. 

Lorsqu’Alexandra a 20 ans, la famille est confrontée en Pologne à la brutalité de l’antisémitisme d’État : interrogatoires, parents licenciés. Les Juifs quittent massivement le pays. L’auteure est envoyée en France pour poursuivre ses études de droit. 

Cinquante ans après avoir quitté la Pologne, elle y retourne en quête de documents archivés. Elle s’attache également à comprendre les Mémoires de son père. 

Un témoignage d’une grande force et une réflexion nourrie de recherches historiques et de faits actuels. Une autobiographie dans un contexte plus global de la présence juive en Pologne depuis des siècles.

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TU LA RETROUVERAS

Jean Hatzfeld

Gallimard, 208 pages

Pendant l’hiver 1944-1945, deux fillettes : Scheindel, juive et Izeta, tzigane, se sont réfugiées dans le zoo de Budapest en ruine où les animaux, affamés sont laissés à l’abandon.

Débrouillardes et vives, toujours en alerte, elles se donnent pour mission d’organiser la fuite des girafes, zèbres et autres résidents du zoo, hors de la ville tenue par les nazis et encerclée par l’Armée rouge.

Des années après la guerre, Scheindel retourne à Budapest à la recherche de son amie Izeta…En 1995, à Sarajevo, elle poursuit toujours l’ombre d’Izeta…

Malgré cette triste période de guerre, ce roman reste émouvant et plein de vie.

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TOUT LE MONDE N’A PAS LA CHANCE D’AIMER LA CARPE FARCIE

Élise Goldberg

Verdier, 160 pages

Élise Goldberg nous offre un premier roman qui explore ses origines familiales à travers la cuisine ashkénaze.

Un grand-père meurt. Une petite-fille récupère son frigo et l’installe dans sa cuisine. La porte à peine ouverte, nous franchissons la frontière de la Pologne juive, et c’est un monde qui se découvre, un monde de foies de volaille, d’ »ognonnes », de gefilte fish, de carpe farcie, de tsibèlès mit eyer, gehakte leybèr, a stykèlè keyz kikhn, knaydlekh, fiss ou galekh, kreplekh ou kroupnik, klops, lokshn kouguel, kashè, shmalts herring, hallah, tshoulnt…

Un vrai régal de saveurs culinaires ashkénazes.

Mais ne vous y trompez pas, ce livre n’est pas énième livre de recettes traditionnelles. C’est une boussole, une horloge à remonter le temps, des souvenirs d’enfance, le yiddish de nos parents, celui qu’on ne peut oublier : shmattè, shayn maydalè, shlémil, shlimazl, shlèpper, schnorrèr, shmattè, khoutspè, pilpoul

Ce livre parle de yiddish, de nourriture, de souvenirs et de transmission ! Super moment avec ce livre.

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