Les livres pour les vacances de février mars 2016
Voici les livres que vous trouverez sur la table des nouveautés pour février – mars
LA CARTE DES MENDELSSOHN
Auteur : Diane Meur
Editeur : Sabine Wespieser
Cette étude d’une famille emblématique allemande est le résultat d’une recherche qui a duré plusieurs années. La reconstitution des descendants de “Moses Mendelssohn” est l’objet d’une carte que Diane Meur a fixée sur le papier, et qui a trôné sur sa table de séjour ! C’est tout dire !
Que nous dit cette carte ? Elle met en relief la réussite sociale d’une famille juive allemande assimilée, qui n’a pas conservé sa culture basée sur la religion, et uniquement sur la religion. La plupart de ses membres se sont même convertis au protestantisme, puis au catholicisme. Tous ou presque n’ont eu comme objectif de faire grossir leur fortune, et par leurs mariages, de consolider leur place dans la bourgeoisie… Deux siècles plus tard, le nazisme saura leur rappeler d’où ils viennent.
C’est un livre touffu, et les méandres de cette recherche nous font parfois perdre de vue l’essentiel. Diane Meur écrit de façon très vivante, mais nous livre ses états d’âme, ce qui alourdit l’histoire déjà complexe en elle-même. Dommage.
LES VENDEURS DE CIGARETTES
Auteur : Joseph Zieman
Editeur : Ovadia
Joseph Zieman a survécu à la destruction du ghetto de Varsovie. Au cours de ses « sorties » du côté aryen, il a remarqué une bande de gamins affamés qui vendaient des cigarettes.
Il a vite compris qu’il s’agissait d’enfants juifs qui survivaient dans des conditions inimaginables.
C’est grâce à son témoignage que nous pouvons tenter de nous rendre compte de ce que fut la vie pleine de risques de ces enfants dont certains ont survécu. Ce livre est bouleversant.
KAFKA A PARIS
Auteur : Xavier Mauméjan
Editeur : Alma
Si vous pensez que cette narration a un rapport avec la vie tourmentée de Kafka et de son grand ami Max Brod, vous faites erreur :
L’auteur relate une escapade fictive de Kafka et de son compère, las de la vie praguoise.
Les voilà qui débarquent à Paris, et se trouvent embarqués dans une série de visites et de rencontres drôlatiques qui ne leur laissent aucun répit. Ils vont ainsi visiter les égoûts de Paris en compagnie d’un drôle de zigoto, faire la connaissance d’un gars nommé Guillaume Apollinaire, …
Ils rentreront fourbus, comme de juste… Et nous nous serons bien amusés.
Et toujours
JUIFS ORDINAIRES …,
Auteur : Yehoshue Perle
Editeur : Classiques Garnier
Ce livre est un classique de la littérature yiddish qui vient d’être traduit par Jean Spector, Nathan et Micheline Weinstock.
Ce livre comprend trois textes de Perle :
un roman paru en 1936 à Varsovie “Juifs ordinaires”, pour lequel l’auteur a reçu de nombreux prix (dont celui du BUND en 1937) ;
un témoignage intitulé “L’anéantissement de la Varsovie juive”,
et un texte, “4580”, d’une ironie et d’une dérision portées à leur extrême.
Le roman est écrit à la première personne : c’est un petit garçon qui raconte la vie de sa famille recomposée (déjà !), depuis ses premiers souvenirs jusqu’à l’adolescence. Nous sommes dans un shtetl du fin fond de la Pologne, peuplé de juifs très pieux et superstitieux ; ils vivent tant bien que mal, tous pauvres et sans éducation, sauf une à deux familles de rupins pas toujours bienveillants. Le jeune garçon observe avec beaucoup d’acuité cette population dont le seul réconfort ne peut venir que de Dieu. Vivant parmi les femmes (les hommes sont souvent absents, à leur travail ou à leurs affaires), il les regarde presque en adulte : leur sexualité parfois débridée l’interpelle et l’amène à se poser des questions d’adulte. Rien n’échappe à son regard sensible.
Ce magnifique roman écrit d’une plume pleine de vivacité et d’acuité est un bonheur de lecture. Un grand merci aux valeureux traducteurs.
Les deux autres textes mettent en avant une autre facette de l’écrivain : sa révolte sans concession contre es nazis, mais surtout contre leurs « chiens », à savoir la police juive et le Judenrat. Ce sont deux cris, deux refus absolus de la médiocrité humaine, de sa lâcheté, de son égoïsme foncier.
LE MYTHE D’ISAAC BECKER
Auteur : Reed Farrel Coleman
Editeur : Ombres noires
Coleman est surtout connu pour ses romans policiers, lesquels mettent en scène un policier juif américain.
Le mythe d’Isaac Becker nous raconte tout autre chose : nous sommes en 1944, au camp de Birkenau. Isaac et Jacob tentent de survivre, mais Isaac consigne leur quotidien dans un livret caché. Ils n’ont quune crainte, c’est que leur bourreau le plus féroce, Heilmann (Sainthomme !), ne le découvre… Ce qui finit par arriver. Le « Livre des spectres » est désormais dans sa chambre, et il fait absolument aller le récupérer…
Quelques 70 ans plus tard, Jacob se prépare à mourir. Interrogé sur l’histoire de sa vie, il fabrique un « journal des spectres » qui n’a pas grand’chose à voir avec celui d’Isaac, et pourtant…
C’est un texte court, plein d’interrogation sur ce qu’est un témoignage, sur la facilité avec laquelle on peut mentir, et sur le retentissement de toute « affaire » ayant la Shoah pour fond de commerce.
UNE MER, UNE TERRE
Auteur : Maayan Ben Hagai
Editeur : Phébus
Premier roman d’une jeune écrivaine israélienne, qui dresse le portrait de deux femmes ayant vécu une longue vie pleine d’incompréhension et d’amour : la mère, Claudia, ancienne beauté coquette vieillie par une existence d’émigrée difficile ; la fille, Anna, sans attrait, et sans goût de vivre.
Claudia a connu son heure de gloire, au temps où elle était jeune, riche et célèbre dans son milieu bourgeois du Caire. Son émigration forcée en Israël n’a en rien entamé ni son assurance, ni ses certitudes. Mais elle ne parvient pas à modeler sa fille Anna, la quarantaine, afin qu’elle adopte ses manières, ses goûts, son arrogance.
De son côté, Anna a du mal à supporter Claudia, mais elle lui devient toute dévouée lorsque le médecin découvre le cancer qui va emporter sa mère.
Les relations mère-fille sont au centre de ce livre de souvenirs qui démonte les clichés liés à l’histoire familiale avec beaucoup de finesse. Très intéressant.