Otto Dov Kulka : Paysages de la Métropole de la Mort

Otto Dov Kulka : Paysages de la Métropole de la Mort, Albin Michel, 201 p.

Otto Dov Kulka est un historien israélien né en Tchécoslovaquie en 1933. C’est l’un des grands spécialistes de l’histoire contemporaine. Or, dans son nouveau livre, au demeurant inclassable, il nous fait découvrir une nouvelle facette de sa personnalité : son talent littéraire , qu’il convoque pour évoquer son propre passé. Pourtant, parvenu presque à la fin du livre, on peut lire qu’il n’aime pas la fiction. On verra plus loin pourquoi…

L’adulte qu’il est devenu « dialogue » en quelque sorte avec l’enfant qu’il fut : ce jeune Otto envoyé à Birkenau avec sa mère. Ces images du passé, ces fulgurances, ces impressions de » déjà vu » alors qu’il retourne visiter le camp à soixante ans passés, le ramènent sans cesse vers ce que fut sa vie d’enfant voué à la mort, et qui, cependant, garde la certitude de survivre. Il n’a rien oublié : la beauté de la neige, du ciel bleu, la noirceur des crématoires, les « myriades d’êtres humains engloutis ». Des fils invisibles le rendent prisonnier de ce passé, de cette enfance accrochée à la vie en dépit de tout. Seul, un enfant est capable de ressentir des bribes de plaisir, dans la Métropole de la Mort ; d’apprécier « l’acoustique merveilleuse » d’un lieu où les bourreaux font chanter l’Hymne à la Joie !

En nous parlant de sa propre « mythologie », il récuse à la fiction la capacité de faire comprendre ce qu’il a vécu… Même le film Shoah ne trouve pas grâce à ses yeux : « je ne trouve pas en eux ce qu’ils cherchent à faire passer », dit-il. A ses yeux, l’explication se trouve dans Kafka. Pourtant, ce texte, tout inclassable qu’il puisse être, nous ramène à la littérature, sans doute malgré lui…

Nous attendons vos réflexions sur ce livre magnifique.

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