Grammaire descriptive du Yidiche contemporain

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en ligne: Yiddish

jpg_grammaire_yid.jpgQuelques mots sur l’auteur

Bernard VAISBROT, né à Paris en 1946 de parents bundistes, a appris à chérir la culture

populaire dans une logique socialiste et le bilinguisme dans une perspective autonomiste. Il pratique

depuis son adolescence des activités culturelles en yidiche (chant, poésie, théâtre).

Entré à la faculté des Sciences en 1963, il y côtoie les étudiants juifs. Il se passionne pour

l’astrophysique et la recherche en observatoire. Dans le même temps, il veut découvrir le judaïsme

et finit par renouer en 1970 avec la tradition ashkénaze de ses grands-parents. Il lutte pour la

pérennisation de ce rite en marge d’une communauté à majorité séfarade. Dans la communauté de

Boulogne, il prépare des jeunes à la bar-mitsva depuis 1975 et pilote un office spécial pour les

grandes fêtes depuis une dizaine d’années.

Certifié de Mathématiques, il entame en 1973 un second cursus au Département d’Études

hébraïques de l’Université Paris 8. Dès l’obtention de son doctorat sur Itsik Manguèr, poète ayant

puisé à la fois dans le folkore et la tradition, il y enseigne la langue et la littérature yidiches jusqu’à

aujourd’hui. Il garde une prédilection pour le déchiffrage des manuscrits hébreux ou yidiches. Sa

connaissance des textes sacrés et de la liturgie lui ouvre les portes du monde juif traditionnel des

siècles précédents.

Il contribue à la diffusion du yidiche en créant plusieurs cours de langue et de littérature

dans les Centres communautaires de Paris et à l’Institut Martin Buber de Bruxelles. Il conseille

également de jeunes chanteurs dans leur découverte du folklore et de la musique hassidique

(Jacques Grober, Violette Szmajer, Annie Darmon, Milena Kartowski).

Une fois que la Bibliothèque Medem quitte les locaux du Cercle Amical pour s’agrandir, il y

recrée la troisième bibliothèque yidiche de France (Bibliothèque du Centre Medem) avec 2500

titres. Cette bibliothèque aide également de nouveaux cercles d’études du yidiche à s’équiper et

aussi les bibliothèques universitaires (BNF, Mulhouse, Trèves) à compléter leurs collections.

Il participe à des ouvrages collectifs de traductions littéraires avec les professeurs Rachel

Ertel et Delphine Bechtel, puis supervise au Centre Medem des traductions de manuscrits ou

d’imprimés sur la Shoa (Livres du Souvenir en particulier).

Il soutient l’effort de promotion de la langue en publiant des historiettes (1997-2007) dans le

journal étudiant new-yorkais Yougnt-Rouf, et également des recensions d’ouvrages parus récemment

en yidiche (2007-2011) dans les Yidishe Heftn de Paris.

Co-auteur du Dictionnaire Français-Yiddish de 24 000 entrées (1992) et du Dictionnaire

Yiddish-Français de 37 000 entrées (2002), il comble aujourd’hui une lacune importante dans les

outils de transmission du yidiche pour francophones à l’aide de cette Grammaire descriptive du

yidiche contemporain qui se veut aussi complète que possible.

Bref historique de la langue yidiche

Il s’agit d’une langue germanique par la majorité de son lexique et de sa morphologie, mais

fortement marquée par des importations de mots, expressions et tournures hébraïco-araméennes et

également influencée par les langues slaves, tant dans la prononciation que pour nombre de formes

grammaticales. Elle s’est toujours écrite en caractères hébreux, mais selon un système propre qui a

évolué au cours des siècles et qui est aujourd’hui normalisé.

Cette langue est née parce que l’hébreu n’était plus parlé par la population juive en exil, sauf

dans la prière et l’étude. Les plus anciennes traces écrites de yidiche ne ressemblent pas à l’allemand

actuel, mais à une variété d’allemand parlée au 12e s. dans le sud de l’Allemagne, dénommé

Mittelhochdeutsch, remplacé 3 siècles plus tard par une langue plus synthétique appelée

Hochdeutsch. Le yidiche, langue populaire, familiale, mais aussi rabbinique, va développer une

littérature suivant trois axes : explication des Textes sacrés, importation de contes et romans

européens, et production populaire : pièces de théâtre, chansons, complaintes et même prières pour

les femmes.

Au 14e s., les juifs chassés d’Allemagne trouvent refuge en Europe de l’Est, notamment en

Pologne, où leur langue se « créolise » : elle continue à se parler sur un autre terroir que celui où

elle est née. Sa prononciation change, de nouveaux mots sont utilisés. Ainsi naît le yidiche oriental.

Quant au yidiche occidental, qui perdure en Alsace-Lorraine, il ne suit pas cette évolution. Et le

yidiche des empires allemand et austro-hongrois finira par s’éclipser avec l’émancipation des juifs

dans ces pays.

En Pologne, le yidiche commence à s’imprimer au 16e s. et sert à une meilleure compré-

hension de l’hébreu. Jusqu’au 20e s., l’étude traditionnelle en Europe de l’Est se fait en yidiche et

cette métalangue s’imprègne progressivement des termes et tournures spécifiques de l’hébreu, en

harmonie avec les habitudes héritées de l’allemand. A partir du 18e s., le hassidisme fait du yidiche

le vecteur privilégié de l’enseignement de maître à disciple, même si les versions imprimées de cet

enseignement sont immortalisées en hébreu. L’apologue ou le conte édifiant fixent la langue.

En même temps, le yidiche connaît d’autres vocations, culturelles ou politiques, à la faveur

de l’attrait des Lumières, qui se font jour en Europe de l’Est. Le théâtre, la presse, le roman et la

poésie ne sont pas seulement ludiques : ils sont à la fois identitaires et revendicatifs. La

discrimination et les persécutions anti-juives dans l’empire tsariste font migrer des centaines de

milliers de yidichophones vers les Amériques, et le yidiche oriental se diffuse en France, Grande-

Bretagne, Belgique, Afrique du Sud, et dans les pays du Nouveau Monde, où il se créolise pour une

seconde fois, mais avec très peu de changements.

Le fait que le yidiche a été à la fois langue du peuple et langue des Maîtres est la cause du

miracle de sa transmission et de son unicité. En effet, les philologues et linguistes ont la grande

surprise au cours des années 1920 de constater que, malgré des différences dialectales de

prononciation, le yidiche est une seule et même langue, qu’il est facile de normaliser. Les juifs de

gauche organisent un enseignement primaire en yidiche, dont l’hébreu n’est pas exclus, en Pologne,

en Lituanie et en Volhynie. En U.R.S.S., on enseigne aussi le yidiche, mais l’orthographe des mots

d’origine sémitique, purement consonantique d’ordinaire, devient vocalisée, ce qui coupe l’osmose

avec l’hébreu.

Eradiquée de Pologne, de Lituanie et de Hongrie par le génocide nazi, décapitée en U.R.S.S.

par les stalinistes, la langue yidiche connaît un nouvel essor en Israël, à la barbe des sionistes,

qu’elle dérange et qui s’opposent à son développement. L’impression de livres yidiches en Israël

rivalise avec celle des U.S.A., non par le nombre d’exemplaires, mais par la quantité de titres.

Aujourd’hui, le yidiche reste pratiqué par des orthodoxes du monde entier, comme langue

maternelle, langue-écran et métalangue d’étude. Pour beaucoup de juifs émancipés ou assimilés, il

reste langue de culture et de nostalgie. La richesse et la diversité de son lexique, la multiplicité de

ses tournures et ses mutations successives en font un terrain de choix pour les linguistes

professionnels.

La grammaire descriptive de B. Vaisbrot

Elle est publiée par les Editions Suger/Suger Press – Université de Paris-8, 2 rue de la

Liberté 93200 SAINT-DENIS avec le concours du Centre Medem/Arbeter-Ring, 52 rue René

Boulanger 75010 PARIS. ISBN 2 – 912590 – 35 – 3. Prix : 36 €.

Cette nouvelle grammaire précise sa propre structure et traite séparément des questions de

flexion et d’accord d’une part, des questions de syntaxe d’autre part et enfin de la formation des

mots. Cela lui permet d’entrer dans les moindres détails suivant une classification rigoureuse, en

particulier pour les mots dérivés et composés. La contribution de l’hébreu au lexique yidiche est

particulièrement étudiée au point de vue prononciation et accentuation.

L’auteur a cherché à suivre la théorie fonctionnelle : les choix linguistiques se font en vue

d’améliorer la communication. La modification d’une voyelle change le sens d’un mot, le dépla-

cement d’un mot change le sens de la phrase, etc.

Chaque point est illustré par un ou plusieurs exemples traduits en français. La transcription

phonétique est indiquée partout où c’est nécessaire : place de l’accent tonique et vocalisation des

mots importés de l’hébreu.

L’ouvrage comporte une table des matières détaillée (163 paragraphes), 42 tableaux

grammaticaux, 8 schémas syntaxiques plans, de nombreuses listes et un index. Il compte XVII +

369 pages. Il est introduit par une préface du professeur Claude Hagège, un des spécialistes

mondiaux de linguistique générale.

Il s’adresse aux étudiants de seconde année, aux enseignants de yidiche et aux chercheurs.

L’ouvrage comprend 4 parties : Graphie-phonation / Morphosyntaxe / Syntagmatique /

Synthématique. Chaque partie est précédée d’une introduction pour les non-spécialistes, précisant

son plan et la terminologie employée.

La première partie comprend notamment les questions d’orthographe normalisée, les questions de

phonétique relatives aux différents dialectes, le changement de prononciation des

mots empruntés à l’hébreu, et toutes les élisions et abréviations (sigles, unités de mesure,

bénédictions, etc.).

La seconde partie est subdivisée en quatre :

le groupe nominal : étude des déterminants et des adjectifs, pluriels, complémentations

 

diverses du nom ou de l’infinitif substantivé ;

 

les pronoms : descriptifs, interrogatifs et relatifs ; à propos de ces derniers se trouvent

étudiées les différentes sortes de propositions subordonnées ;

le groupe verbal : étude de tous les compléments (directs / prépositionnels / verbaux /

 

circonstanciels) ; étude des adverbes (centraux/périphériques) ; étude des temps / modes

/ aspects ; participes passés irréguliers ; préverbes / coverbes / verbes complexes ; verbes

pronominaux / voix passive ; verbes avec prédicat d’attributs ;

 

les sections spéciales : sections autonomes/elliptiques et prédicatoïdes.

La troisième partie traite des différentes sortes de phrases : simples/complexes, et des éléments

modulables, à savoir :

 

les phrases simples : déclaratives, déclaratives avec focalisation, interrogatives,

exclamatives ;

 

les phrases complexes : avec subordination, avec coordination, discours indirect, etc. ;

 

les éléments modulables : les interversions, les ellipses, la ponctuation, la prosodie.

La quatrième partie envisage respectivement pour les noms, adjectifs, adverbes puis verbes :

les dérivés, les composés et les combinés (composés et dérivés à la fois)

L’ouvrage est en format A4 paysage pour une meilleure lisibilité des tableaux.