Livres de la rentrée sept – oct 2021

HENRY KISSINGER, l’Européen,

Jérémie Gallon

Gallimard, 244 pages

On pourrait se demander ce qu’un livre sur Kissinger le républicain vient faire au centre Medem. C’est que l’auteur, lui-même centré sur la politique étrangère européenne nous montre dans cet ouvrage passionnant ce que l’Europe peut tirer comme leçon de la pensée de Kissinger.

Cette biographie précise très bien documentée est conduite de main de maître. La troublante personnalité de Kissinger, sa remarquable intelligence nourrie à des sources européennes aussi bien qu’américaines, sa vision à long terme, très pessimiste au demeurant, sa ruse en ont fait une personnalité irremplaçable dans son rôle de secrétaire d’état aux affaires étrangères. Durant les quelques huit années du règne de Nixon, il en a été le fidèle conseiller, envers et contre tout. Nixon l’antisémite ne pouvait se passer de lui ; Kissinger, certain du rôle historique qu’il avait à jouer a accepté toutes les avanies de son maître.

L’avidité du pouvoir, le besoin de reconnaissance, de célébrité, n’en font pas un personnage toujours sympathique, loin de là. Mais Jérémie Gallon montre aussi que Kissinger savait tirer des leçons de ses mentors, à commencer par Metternich. La Realpolitik, ce fut lui.

La conclusion de l’auteur est très intéressante pour nous, faibles Européens.

Une biographie exceptionnelle en tous points;

VIVRE AVEC LES MORTS

Delphine Horvilleur

Grasset, 234 pages

Pas de leçon, pas de conseil dans ce court ouvrage facile à lire. C’est une sorte de dialogue que l’auteur engage avec le lecteur.

On sent que Delphine Horvilleur prend beaucoup de plaisir à écrire et qu’elle nous réserve encore d’autres bonnes surprises.

Son art de la formule est très plaisant et souvent proche de la poésie.

Un plaisir de lecture.

DE SANG ET D’ENCRE

Rachel Kadish

Cherche-Midi et Pocket, 954 pages

N’ayez pas peur du nombre de pages : ce roman se lit comme un polar à suspense.

L’intrigue se présente comme une double hélice. Une professeure universitaire, Helen Watt, est contactée pour examiner un recueil de textes datant du 17e siècle, découverts dans un cagibi. L’université consent à lui adjoindre Aaron Lévy, doctorant de son état. Leur relation est difficile mais ils sont forcés de s’entendre, car ces manuscrits doivent prochainement être vendus.

C’est le contenu inattendu de ces manuscrits qui constitue la deuxième intrigue : où l’on voit une jeune fille séfarade, Ester, adoptée par un rabbin érudit venu d’Amsterdam, se passionner pour l’étude et la recherche. Nous sommes au 17e siècle, les femmes juives ne sont pas autorisées à s’adonner à ce type d’activité.

Entre ces deux intrigues se tissent des liens au fil des pages dans la mesure où le texte ancien entre en résonance avec ce que vivent les deux chercheurs.

Ce roman très documenté nous permet de découvrir un siècle extrêmement riche du point de vue de l’histoire des idées. C’est tout l’intérêt de ce livre. N’oublions pas que l’athéisme fait son apparition, que Spinoza dialogue avec Hobbes, que Descartes est son modèle, etc…. Ester de son côté veut être une femme libre, même si elle écrit sous un pseudonyme masculin . Nous avons là un condensé de l’histoire sociale des juifs de Londres au 17e siècle.

Roman d’une très grande richesse.

LA RACE DES ORPHELINS 

Oscar Lalo

Belfond, 279 pages

Ce cri de douleur, cet inlassable questionnement, est poussé par une femme de 76ans. Née coupable d’avoir vu le jour dans un « Lebensborn ». Quasi illettrée, elle fait appel à un scribe afin de témoigner. Hildegard Müller est le nom qu’elle s’est vu attribuer ; qui sont ses parents ? quelle est son enfance ? Née coupable, elle se considère « fille » de Hitler. Ce poids qui pèse sur sa vie, elle ne peut s’en défaire. Les recherches pour connaître sa mère mènent en Norvège. Mais cela n’ôte rien à la haine dont elle est victime ; cette haine qu’elle « sent comme un chien »….

Texte difficile à lire en raison de l’empathie qui nous saisit, face à cette victime de l’Histoire.

DIBBOUKS

Irène Kaufer

L’Antilope, 223 pages

Ce récit déroutant met en scène l’auteure, partie sur les traces d’êtres humains dont les noms sont tabous dans sa famille. Ces malheureux qui n’ont pas de tombe la hantent depuis qu’elle est petite. Comment partir à leur recherche ? Sur les conseils d’une « psychorabbine », elle part afin de se débarrasser une bonne fois pour toute de ses dibbouks.

Tout en racontant son périple et sans se soucier de l’aspect affabulateur, Irène Kauffer pose une regard ironique et pas toujours tendre sur sa famille, sur la rabbine et sur elle-même. Si bien que l’atroce côtoie le rire.

Ne cherchez surtout pas à saisir le fil d’Ariane : il n’y en a pas.

LES ABEILLES D’HIVER

Norbert Scheuer

Actes Sud,  356 pages

Ce roman inclassable raconte la vie d’un apiculteur allemand, Egidius Arimond, dans les années 1943-44. Il habite dans un village proche de la frontière belge, en essayant de subsister comme il le peut : démis de ses fonctions de professeur de latin et d’histoire, en butte à l’hostilité des villageois, il sert aussi de passeur à des juifs fuyant l’Allemagne. Il est jeune mais n’a pas été enrôlé dans l’armée en raison de ses crises d’épilepsie. Ces crises risquent du reste de le mener directement dans un centre de mise à mort des handicapés. Cela ne l’empêche nullement de courir après les jeunes femmes esseulées dont les maris sont au front. Voilà pour l’intrigue.

Sur cette histoire viennent se greffer des remarques, des textes parfois poétiques de deux ordres : d’une part sur la vie des abeilles que nous apprenons à connaître dans les moindres détails ; d’autre part sur l’un de ses ancêtres, Ambrosius Arimond, lequel aurait été le premier apiculteur de la famille, installé en l’an de grâce 1492. Egidius a entrepris de traduire des fragments de texte de son supposé ancêtre, relatifs à la vie de son temps. Sans perdre le fil, nous naviguons dans le journal d’Egidius sans savoir s’il va survivre. Il va ainsi son bonhomme de chemin, attentif à tous les dangers, jusqu’à la page finale.

Livre original bien écrit et traduit.

MONSIEUR ROMAIN GARY

Kerwin Spire

Gallimard, 324 pages

Le titre exact du livre comporte la mention suivante : « Consul général de France, 1919 Outpost Drive Los Angeles28, California ». De fait, l’auteur a mené une enquête très poussée sur la vie de Romain Gary à Los Angeles, en tant que Consul général de France. La note que son supérieur hiérarchique lui a attribuée est de 18/20. En effet, Romain Gary a accompli un travail remarquable pour redorer le blason de la République française auprès des Américains. Compagnon de la Libération auréolé de gloire, son amour inconditionnel pour la France (et pour le Général de Gaulle) a fait merveille. Il a travaillé sans relâche, côtoyant tous les milieux « qui comptent », y compris celui du cinéma. Son élégance, sa distinction, son sens politique ont fait l’admiration de tous.

Mais il y a plus : durant toute cette époque, il a beaucoup écrit, obtenant le prix Goncourt pour son roman « Les racines du ciel ». Ce livre a eu un immense succès aux Etats-Unis. (John Ford sera engagé pour en tirer un film).

Kerwin Spire précise dans une note qu’il ne s’agit pas d’une véritable biographie.

Ce livre, venant après d’autres biographies sur Gary, est très intéressant et agréable à lire, nous dévoilant une facette peu connue de Romain Gary.

Heureux comme un juif en France? : réflexions d’un rabbin engagé

Yann Boissière

Tallanddier, 156 pages

Le rabbin Boissière fait partie de ces gens de bonne volonté pour lesquels la paix et la sagesse doivent prévaloir. Cela ne l’empêche nullement de donner un avis clair sur les difficultés à vivre ensemble, en particulier au côté des musulmans de France. C’est l’un des points principaux abordés, sans naïveté ni agressivité. Certaines formules heureuses viennent montrer que tout ne va pas de soi ; qu’il est bon de revenir à la raison ; que les juifs doivent eux aussi faire la part des sentiments.

Un court essai utile, écrit dans une langue limpide.

Juifs d’ailleurs : diasporas oubliées, identités singulières

sous la dir. D’Edith Bruder

Albin Michel, 494 pages

Cet ouvrage très documenté vient combler une lacune : jusqu’à présent, il n’existait aucun livre en français recensant l’ensemble des communautés juives de par le monde. Sans prétendre à l’exhaustivité, il semble néanmoins assez complet.

Comment se présente-t-il ?

Classé en huit parties dont la dernière esquisse une vision contemporaine de ces judéités si diverses, il adopte un classement géographique (et non chronologique). Nous faisons ainsi connaissance avec les communautés juives du monde entier : juifs de l’Islam, de Russie et des pays environnants, d’Amérique latine, d’Inde, d’Afrique subsaharienne et enfin de Chine.

Pour chaque zone étudiée, une carte, un chapitre historique et ethnographique, la religion juive « indigène », et très souvent les raisons de l’émigration.

Glossaire et bibliographie indicative.

La dernière partie s’intitule « Identités et mouvement » : identités plurielles car chaque communauté a sa culture propre, son langage, ses coutumes… Comment, dans ces conditions, se faire reconnaître en tant que juif ? Comment faire son alya ?

Excellent livre documentaire de fonds.

Et toujours disponible la sélection de mai – juin

LEO FRANKEL, communard sans frontières

Julien Chuzeville

Libertalia, 276 pages

Né en Hongrie en 1844, dans une famille juive, Léo Frankel fut un des communards les plus éminents. En reconstituant son parcours depuis son arrivée en France, en s’appuyant sur une documentation précise, l’auteur dresse le portrait d’un militant hors du commun : ouvrier orfèvre totalement dévoué à la cause ouvrière, adhérent de l’Association internationale des Travailleurs, il sera rapidement reconnu par ses pairs. Sa situation d’étranger ne l’empêchera pas d’être élu à différents postes durant la Commune de Paris dès l’âge de 27 ans. Il fera preuve d’une très vive intelligence, d’une grande compréhension des problèmes rencontrés par la « base ». Fin diplomate, orateur convaincant, il sera membre du groupe de Marx et Engels avec lesquels il aura de nombreux échanges d’idées. Lorsque la Commune sera minée par des dissensions, il ne participera pas aux querelles.

Entre 1871 et 1896, date de sa mort, il travaillera dans plusieurs pays d’Europe en internationaliste convaincu. C’est la tuberculose qui aura raison de lui.

Nous aurions aimé en savoir un peu plus sur ses origines, sa famille, sa vie privée… c’est ce qui manque à cet ouvrage pr ailleurs très intéressant.

Trois anneaux : Un conte d’exils

Daniel Mendelsohn

Flammarion, 192 pages

Dans ce récit aux mille tours, Daniel Mendelsohn explore les correspondances mystérieuses entre le hasard qui régit nos existences et l’art des récits que nous en formons.

Trois anneaux commence par raconter l’histoire de trois écrivains en exil qui se sont tournés vers les classiques du passé pour créer leurs propres chefs-d’oeuvre. Erich Auerbach, le philologue juif qui fuit l’Allemagne nazie pour écrire sa grande étude de la littérature européenne, Mimésis, à Istanbul. François Fénelon, l’évêque du XVIIe siècle, auteur d’une merveilleuse suite de l’Odyssée,

Les Aventures de Télémaque, best-seller de son époque, qui lui valut le bannissement. Et l’écrivain allemand W.G. Sebald, qui s’exila en Angleterre, et dont les récits si singuliers explorent les thèmes du déplacement et de la nostalgie.

À ce conte d’exils, Daniel Mendelsohn ajoute sa propre voix, entrelaçant l’histoire de la crise qu’il traversa entre l’écriture de la grande fresque mémorielle des Disparus et celle du récit intimiste d’Une Odyssée.

L’« art poétique » qui en résulte est un hommage aux mondes grecs et juifs, un trait d’union entre Orient et Occident et une ode à la littérature française.

À travers l’étude d’un procédé caractéristique de la littérature homérique (le récit circulaire et ses boucles narratives), Trois anneaux retrace aussi avec brio une autre histoire de la littérature, qui relie Homère, Fénelon, Proust et Sebald, création et commentaire, imagination et esprit critique.

On retrouve ici l’immense érudition de l’auteur qui nous fait découvrir les liens qui unissent à travers les siècles des écrivains si différents. Ce livre s’adresse à un lecteur averti ; si l’on n’a pas lu « Les disparus » et « Une Odyssée », ce livre devrait donner envie de le faire .

Division avenue

Goldie Goldbloom

Christian Bourgeois, 360 pages

Traduit de l’anglais ( Etats-Unis ) par Eric Chédaille .

Une plongée dans une famille Hassidique d’aujourd’hui  à New-York ou l’on découvre le personnage principale,

Surie, mère de dix enfants , en proie à un terrible secret auquel va s’ajouter le souvenir de son fils Lipa  qu’elle a perdu, alors qu’il avait la vingtaine et qui ,lui aussi avait gardé le silence sur une part de sa vie. Cette situation va lui suggérer un autre regard sur la vie .

L’écriture est légère malgré la problématique de la situation.

Lorsque l’on entre dans le roman, on a aussitôt le désir de découvrir la suite .

Nos sélections récentes

Bibliothèque Centre Medem

Et aussi les plus anciennes sélections de la bibliothèque

Livres de mai – juin 2021

LEO FRANKEL, communard sans frontières

Julien Chuzeville

Libertalia, 276 pages

Né en Hongrie en 1844, dans une famille juive, Léo Frankel fut un des communards les plus éminents. En reconstituant son parcours depuis son arrivée en France, en s’appuyant sur une documentation précise, l’auteur dresse le portrait d’un militant hors du commun : ouvrier orfèvre totalement dévoué à la cause ouvrière, adhérent de l’Association internationale des Travailleurs, il sera rapidement reconnu par ses pairs. Sa situation d’étranger ne l’empêchera pas d’être élu à différents postes durant la Commune de Paris dès l’âge de 27 ans. Il fera preuve d’une très vive intelligence, d’une grande compréhension des problèmes rencontrés par la « base ». Fin diplomate, orateur convaincant, il sera membre du groupe de Marx et Engels avec lesquels il aura de nombreux échanges d’idées. Lorsque la Commune sera minée par des dissensions, il ne participera pas aux querelles.

Entre 1871 et 1896, date de sa mort, il travaillera dans plusieurs pays d’Europe en internationaliste convaincu. C’est la tuberculose qui aura raison de lui.

Nous aurions aimé en savoir un peu plus sur ses origines, sa famille, sa vie privée… c’est ce qui manque à cet ouvrage pr ailleurs très intéressant.

 

Trois anneaux : Un conte d’exils

Daniel Mendelsohn

Flammarion, 192 pages

Dans ce récit aux mille tours, Daniel Mendelsohn explore les correspondances mystérieuses entre le hasard qui régit nos existences et l’art des récits que nous en formons.

Trois anneaux commence par raconter l’histoire de trois écrivains en exil qui se sont tournés vers les classiques du passé pour créer leurs propres chefs-d’oeuvre. Erich Auerbach, le philologue juif qui fuit l’Allemagne nazie pour écrire sa grande étude de la littérature européenne, Mimésis, à Istanbul. François Fénelon, l’évêque du XVIIe siècle, auteur d’une merveilleuse suite de l’Odyssée,

Les Aventures de Télémaque, best-seller de son époque, qui lui valut le bannissement. Et l’écrivain allemand W.G. Sebald, qui s’exila en Angleterre, et dont les récits si singuliers explorent les thèmes du déplacement et de la nostalgie.

À ce conte d’exils, Daniel Mendelsohn ajoute sa propre voix, entrelaçant l’histoire de la crise qu’il traversa entre l’écriture de la grande fresque mémorielle des Disparus et celle du récit intimiste d’Une Odyssée.

L’« art poétique » qui en résulte est un hommage aux mondes grecs et juifs, un trait d’union entre Orient et Occident et une ode à la littérature française.

À travers l’étude d’un procédé caractéristique de la littérature homérique (le récit circulaire et ses boucles narratives), Trois anneaux retrace aussi avec brio une autre histoire de la littérature, qui relie Homère, Fénelon, Proust et Sebald, création et commentaire, imagination et esprit critique.

On retrouve ici l’immense érudition de l’auteur qui nous fait découvrir les liens qui unissent à travers les siècles des écrivains si différents. Ce livre s’adresse à un lecteur averti ; si l’on n’a pas lu « Les disparus » et « Une Odyssée », ce livre devrait donner envie de le faire .

 

 

 

 

Division avenue

Goldie Goldbloom

Christian Bourgeois, 360 pages

Traduit de l’anglais ( Etats-Unis ) par Eric Chédaille .

Une plongée dans une famille Hassidique d’aujourd’hui  à New-York ou l’on découvre le personnage principale,

Surie, mère de dix enfants , en proie à un terrible secret auquel va s’ajouter le souvenir de son fils Lipa  qu’elle a perdu, alors qu’il avait la vingtaine et qui ,lui aussi avait gardé le silence sur une part de sa vie. Cette situation va lui suggérer un autre regard sur la vie .

L’écriture est légère malgré la problématique de la situation.

Lorsque l’on entre dans le roman, on a aussitôt le désir de découvrir la suite .

 

 

 

Et toujours disponible la sélection de mars – avril

HISTOIRE DES JUIFS : UN VOYAGE EN 80 DATES DE L’ANTIQUITE A NOS JOURS

sous la dir. de Pierre Savy

PUF, 586 pages

Les nombreux historiens qui ont participé à la rédaction de cette « somme » peuvent tous faire valoir leur renommée. Tous ont su exprimé la quintescence de leur savoir : cela donne un texte synthétique et clair pour chacune des dates évoquées.

L’ouvrage est divisé en trois parties ; chacune d’entre elles sous la direction d’un.e spécialiste : Katell Berthelot pour Le Temple et l’Exil, Pierre Savy pour Du Moyen Age à l’émancipation, enfin Audrey Kichelewski pour De 1791 à nos jours.

Dans chacune des parties, les auteurs ont retenu des dates significatives dont certaines ont le mérite d’être souvent méconnues du grand public ; exemple : la première loi antisémite (hongroise) de l’Europe d’après-guerre. Si l’on se réfère aux premiers livres d’histoire des juifs, le constat est que le point de vue a changé. La prise en compte des recherches les plus récentes, des découvertes archéologiques rendent ce livre novateur, lui conférant un « langage » contemporain (ainsi en est-il de la « question khazare », par exemple). Le livre contient aussi des bibliographies, un index des noms, des lieux, des mots-clés, ainsi qu’une présentation des auteurs.

Cet ouvrage de fonds est vraiment le bienvenu.

QUITTER PSAGOT

Yonatan Berg 

L’Antilope, 253 pages

Psagot est une petite colonie sauvage implantée à la limite de Ramallah. C’est là que Yonatan Berg a passé sa jeunesse, avant de partir faire son service militaire. Devenu écrivain après avoir un peu bourlingué dans le monde, il nous livre ses réflexions sur le choc qu’il a éprouvé en quittant le monde chaleureux mais factice de sa jeunesse.

Dans Psagot, il n’y a pas de place pour le doute. Profondément religieuse, cette petite enclave entourée de fils de fer barbelés vit repliée sur soi. Pas tout à fait puisque l’armée veille sur elle. Les enfants y vivent heureux et sereins, leurs journées strictement organisées, avec un encadrement rigoureux. Aucun colon, petit ou grand, ne regarde du côté des Palestiniens. Au point que Yonatan ne découvre le camp de réfugiés qui jouxte Ramallah que longtemps après être parti. Sa première expérience du monde extérieur, c’est le lycée, à Jérusalem. Puis il part ;  d’abord à l’armée, puis à la découverte du reste du monde. Progressivement, il remet en question sa vision idyllique de l’enfance, en découvrant d’autres points de vue, d’autres modes de vie.

Il ne s’agit nullement d’un pamphlet, contrairement à ce qu’écrit le Time Israël. Pas de dénonciation, pas d’acrimonie non plus. Plutôt un constat mélancolique : les colonies ne règleront rien. Elles survivent en dehors de la réalité, ne subsistant qu’avec la complicité de l’état. Il faudra bien que l’aveuglement cesse.

Très émouvant, ce récit décrit la situation insoluble actuelle avec beaucoup de sensibilité. Excellent

Août 61

Sarah Cohen-Scali

Albin Michel, 480 pages

Ben, atteint Alzheimer reconnaît difficilement ses proches.

Il va se retourner sur son passé douloureux dans l’Allemagne en guerre, celle de l’après-guerre, puis sur sa vie en Angleterre et en France dans les années 50.

Il n’a jamais oublié Tuva, son amour d’enfance, née dans un lebensborn et qu’il revoit Berlin en 1961 alors que la RDA commence à construire “Le” mur…

 

LES PATRIOTES

Sana Krasikov

Albin Michel, 594 pages

Analyses de deux lectrices de ce livre

Ida

Ce premier roman touffu retrace l’histoire de ces Américains qui ont émigré en Union Soviétique par idéalisme, dans les années 1930.

Le principal personnage, Florence, rejoint Magnitogorsk en 1934, pour une raison qu’elle se refuse d’avouer : sans l’avertir, elle veut rejoindre un certain Serguéi dont elle a fait la connaissance à Cleveland. Celui-ci faisait partie d’une délégation commerciale russe. Si nous faisons allusion à cet aveuglement, c’est que ce trait de caractère a une grande importance dans l’histoire ô combien tourmentée de son existence. Florence devra sans cesse trouver de bonnes raisons de rester vivre en URSS. En fin de compte, le seul moment où elle se sentira en sécurité, c’est lorsqu’elle sera nommée femme de ménage !

D’autres juifs de son entourage sont plus lucides. A commencer par son mari. Entre 1930 et 1952, la situation des juifs empire considérablement : le comité juif antifasciste créé par Staline pour obtenir l’aide américaine est décimé dès la fin de la guerre. La venue de Golda Meyerson lors de la création de l’état d’Israël donne lieu à des arrestations qui n’étonnent personne.

L’étau se resserre sur Flora et sa famille ; la vie de son fils lui important plus que tout, elle commet l’irréparable, avec une mauvaise foi terrifiante. Nous n’en dirons pas plus. Les « refuzniks », comme on le sait, finiront par obtenir la liberté.

Impossible à résumer tant l’histoire est foisonnante, elle nous laisse un goût amer. Tous ces émigrés pleins d’idéal ont payé très cher leur « aveuglement ». Ils ont voulu y croire, envers et contre tout et beaucoup y ont laissé leur vie.

Nous sommes en 2021. Ce roman, cette somme, devrait-on dire, sommes-nous encore capables de bien le comprendre ?  Intéressant et émouvant.

Yaël

Ce premier roman touffu retrace l’histoire des Juifs américains qui sont partis par idéalisme en Russie après la révolution d’Octobre.

Ce qui est intéressant dans le livre c’est qu’à travers trois générations de personnages il révèle des aspects sur l’histoire des Juifs d’Union soviétique (théâtre juif, comité antifasciste), sur la relation entre Staline  et Roosevelt et  sur l’attitude ambigu de celui-ci vis-à-vis des Soviétiques.

Le livre est alimenté par  les évènements historiques et sur l’abondante bibliographie citée en fin d’ouvrage.

Ce livre a une construction littéraire sur une énigme qu’on a de cesse de  découvrir.

Les histoires qui se mêlent en flash-back donnent un rythme au livre et un plaisir au lecteur.

Ce roman débuté au début du 20ème siècle se poursuit  jusqu’à nos jours et intéresse les nouvelles couches de lecteurs car les plus jeunes peuvent se reconnaitre dans les personnages de la dernière génération. Il y a deux clés de lecture qui satisfont deux lectorats, un trentenaire et la génération plus âgée et son histoire personnelle. Tout le monde y trouve son compte. C’est passionnant et instructif.

 

 

Nos sélections récentes

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Les livres de mars – avril 2021

HISTOIRE DES JUIFS : UN VOYAGE EN 80 DATES DE L’ANTIQUITE A NOS JOURS

sous la dir. de Pierre Savy

PUF, 586 pages

Les nombreux historiens qui ont participé à la rédaction de cette « somme » peuvent tous faire valoir leur renommée. Tous ont su exprimé la quintescence de leur savoir : cela donne un texte synthétique et clair pour chacune des dates évoquées.

L’ouvrage est divisé en trois parties ; chacune d’entre elles sous la direction d’un.e spécialiste : Katell Berthelot pour Le Temple et l’Exil, Pierre Savy pour Du Moyen Age à l’émancipation, enfin Audrey Kichelewski pour De 1791 à nos jours.

Dans chacune des parties, les auteurs ont retenu des dates significatives dont certaines ont le mérite d’être souvent méconnues du grand public ; exemple : la première loi antisémite (hongroise) de l’Europe d’après-guerre. Si l’on se réfère aux premiers livres d’histoire des juifs, le constat est que le point de vue a changé. La prise en compte des recherches les plus récentes, des découvertes archéologiques rendent ce livre novateur, lui conférant un « langage » contemporain (ainsi en est-il de la « question khazare », par exemple). Le livre contient aussi des bibliographies, un index des noms, des lieux, des mots-clés, ainsi qu’une présentation des auteurs.

Cet ouvrage de fonds est vraiment le bienvenu.

 

 

ILS ONT TUE LEO FRANK

Xavier Bétaucourt et Olivier Perret

Éd Steinkiss, ca 110 pages

Nos lecteurs du Centre Medem lisent plutôt des romans. Cependant, cette bande dessinée mérite que l’on s’y intéresse : mise en images et en bulles, c’est l’histoire de Léo Frank, lynché en Géorgie (US) dans les années 1915. Honnête patron juif d’une petite entreprise, il est accusé d’avoir violé et tué une jeune ouvrière de 14 ans. Le principal témoin est un gardien noir, le véritable meurtrier. L’enquête est menée d’une façon inique, les juges et jurés sont sous la pression de la populace qui réclame la tête de Frank, excitée par des journaux proches du KKK. Frank est jugé coupable et enfermé dans la prison. Il en sera extirpé par quelques « braves citoyens » qui veulent sa tête, pour être pendu en présence de représentants de la justice et autres édiles.

Cette BD est un « docu-fiction » passionnant, qui met en scène tous les protagonistes ; violents, lâches, parfois hésitants… L’histoire nous est contée par un témoin, lequel n’a pas eu le courage de témoigner, de peur d’être lynché. Ce n’est qu’en fin de vie qu’il se confie à deux journalistes.

Les couleurs qui vont du jaune au brun en passant par l’ocre renvoient au passé, mais aussi à la violence. Les “trognes” sont emplies de haine, les bouches hurlantes…

Excellente BD, à recommander

Pour en savoir plus sur cette affaire lire : L’ Affaire Léo Frank : Dreyfus en Amérique de  Kuperminc Victor aux éditions L’Harmattan – livre présent à la bibliothèque.

 

 

 

 

 

 

QUITTER PSAGOT

Yonatan Berg 

L’Antilope, 253 pages

Psagot est une petite colonie sauvage implantée à la limite de Ramallah. C’est là que Yonatan Berg a passé sa jeunesse, avant de partir faire son service militaire. Devenu écrivain après avoir un peu bourlingué dans le monde, il nous livre ses réflexions sur le choc qu’il a éprouvé en quittant le monde chaleureux mais factice de sa jeunesse.

Dans Psagot, il n’y a pas de place pour le doute. Profondément religieuse, cette petite enclave entourée de fils de fer barbelés vit repliée sur soi. Pas tout à fait puisque l’armée veille sur elle. Les enfants y vivent heureux et sereins, leurs journées strictement organisées, avec un encadrement rigoureux. Aucun colon, petit ou grand, ne regarde du côté des Palestiniens. Au point que Yonatan ne découvre le camp de réfugiés qui jouxte Ramallah que longtemps après être parti. Sa première expérience du monde extérieur, c’est le lycée, à Jérusalem. Puis il part ;  d’abord à l’armée, puis à la découverte du reste du monde. Progressivement, il remet en question sa vision idyllique de l’enfance, en découvrant d’autres points de vue, d’autres modes de vie.

Il ne s’agit nullement d’un pamphlet, contrairement à ce qu’écrit le Time Israël. Pas de dénonciation, pas d’acrimonie non plus. Plutôt un constat mélancolique : les colonies ne règleront rien. Elles survivent en dehors de la réalité, ne subsistant qu’avec la complicité de l’état. Il faudra bien que l’aveuglement cesse.

Très émouvant, ce récit décrit la situation insoluble actuelle avec beaucoup de sensibilité. Excellent

 

 

 

 

 

LA DERNIERE INTERVIEW

Eshkol Nevo

Gallimard, 480 pages

Le narrateur est un  écrivain qui ressemble beaucoup  à l’auteur (il est, comme lui, le petit fils de feu le 3ième premier ministre d’Israël, celui de la Guerre des Six jours, Levi Eshkol)  ; il doit répondre à un vaste questionnaire dressé par un mystérieux webmestre à partir d’un large panel d’internautes.

Les réponses au questionnaire sont le moyen pour le narrateur de  nous raconter des épisodes de sa vie, sans cohérence apparente avec le sens originel de la question posée.

A travers ses réponses, se dévoile le portrait d’un homme chez qui, derrière une façade de réussite, tout part en lambeaux  : sa «  dysthymie  » (trouble de l’humeur défini par un état dépressif chronique) qui  prive l’écrivain de son  inspiration , ses rapports difficiles avec son épouse tant aimée Dikla, ses trois enfants, dont l’aînée, réfugiée dans un campus au sud d’Israël, se refuse à tout contact avec lui depuis que sans lui demander son avis, il l’a placée dans un de ses livres, son meilleur ami qui se meurt d’un cancer,  les souvenirs de la guerre du Liban, un tortueux et cynique homme politique, Yoram Sirkin, pour qui il doit, malgré tout, rédiger des discours, esquisser un parcours, donner des idées. C’est tout l’Israël contemporain qui se dévoile : la question des «  Territoires  » , des voisins,  avec un improbable périple à Damas en Syrie via Izmir en Turquie, le cynisme d’un homme politique dont on devine le modèle .

Roman passionnant,  jalonné de sourires, d’émotion et d’un humour noir et tendre qui tient en haleine jusqu’à la dernière ligne. En dressant ainsi le portrait auto-fictionnel d’un écrivain, c’est en creux le portrait d’un pays tout entier que dessine Eshkol Nevo, un pays lui aussi pétri de contradictions.

Roman qui se dévore de bout en bout ….

 

 

 

SATURNE

Sarah CHICHE

Le Seuil, 208 pages

Avec Saturne, la romancière et psychanalyste Sarah Chiche raconte son histoire et celle de sa famille, tragique, qui l’a autrefois plongée dans une dépression sévère, puis comment, grâce au spectacle de quelques images en Super 8 exhumées par sa mère, et surtout grâce à l’écriture, elle a survécu.

Le livre s’ouvre en 1977 sur une scène tragique, celle de la mort d’un homme de 34 ans dans une chambre d’hôpital. Celle qui raconte l’histoire est sa fille, 15 mois au moment du décès. Dans les jours qui suivent, on ne prend pas la peine de dire au bébé que son papa est mort. Bien des années plus tard, en 2019 à Genève, elle croise par hasard une femme qui a connu son père, son oncle et ses grands-parents en Algérie. Elle est troublée. Au retour, elle plonge dans les souvenirs du passé.

Comme dans un film où les images défilent à la vitesse du train, elle saisit des instantanés de l’enfance de son père : années 50, Alger, son père Harry grandit avec son frère aîné Armand, et ses parents Louise et Joseph. Ils ont riches. Dans la famille les hommes sont médecins de père en fils dans des cliniques qui leur appartiennent. La famille, juive, “ne faisait pas partie des colons français mais vivait sur ces terres depuis qu’ils avaient été chassés d’Espagne au XVe siècle”. Une vie fastueuse jusqu’à la guerre d’Algérie, puis c’est l’exil en France.

En grandissant, Harry est celui des deux fils qui ne répond pas aux attentes familiales, flambeur, amoureux des femmes et préférant le jeux aux études médicales. Puis il rencontre Eve, amour fou et mariage contre l’avis de la famille. La leucémie se déclare quelques mois plus tard, juste après la naissance de leur fille. La mère reste seule avec son enfant, dans une famille qui la déteste, et réciproquement.. Elle finira par être séparée de cette branche de la famille par sa mère, qui s’est remariée, a eu une autre fille. A 26 ans, l’annonce de la mort de sa grand-mère la plonge dans une dépression sévère, qui manque de l’emporter.

L’histoire d’une enfance déchirée par la haine des adultes, dont elle a été la victime.

Saturne est un texte mélancolique et bouleversant.

Août 61

Sarah Cohen-Scali

Albin Michel, 480 pages

Ben, atteint Alzheimer reconnaît difficilement ses proches.

Il va se retourner sur son passé douloureux dans l’Allemagne en guerre, celle de l’après-guerre, puis sur sa vie en Angleterre et en France dans les années 50.

Il n’a jamais oublié Tuva, son amour d’enfance, née dans un lebensborn et qu’il revoit Berlin en 1961 alors que la RDA commence à construire “Le” mur…

 

LES PATRIOTES

Sana Krasikov

Albin Michel, 594 pages

Analyses de deux lectrices de ce livre

Ida

Ce premier roman touffu retrace l’histoire de ces Américains qui ont émigré en Union Soviétique par idéalisme, dans les années 1930.

Le principal personnage, Florence, rejoint Magnitogorsk en 1934, pour une raison qu’elle se refuse d’avouer : sans l’avertir, elle veut rejoindre un certain Serguéi dont elle a fait la connaissance à Cleveland. Celui-ci faisait partie d’une délégation commerciale russe. Si nous faisons allusion à cet aveuglement, c’est que ce trait de caractère a une grande importance dans l’histoire ô combien tourmentée de son existence. Florence devra sans cesse trouver de bonnes raisons de rester vivre en URSS. En fin de compte, le seul moment où elle se sentira en sécurité, c’est lorsqu’elle sera nommée femme de ménage !

D’autres juifs de son entourage sont plus lucides. A commencer par son mari. Entre 1930 et 1952, la situation des juifs empire considérablement : le comité juif antifasciste créé par Staline pour obtenir l’aide américaine est décimé dès la fin de la guerre. La venue de Golda Meyerson lors de la création de l’état d’Israël donne lieu à des arrestations qui n’étonnent personne.

L’étau se resserre sur Flora et sa famille ; la vie de son fils lui important plus que tout, elle commet l’irréparable, avec une mauvaise foi terrifiante. Nous n’en dirons pas plus. Les « refuzniks », comme on le sait, finiront par obtenir la liberté.

Impossible à résumer tant l’histoire est foisonnante, elle nous laisse un goût amer. Tous ces émigrés pleins d’idéal ont payé très cher leur « aveuglement ». Ils ont voulu y croire, envers et contre tout et beaucoup y ont laissé leur vie.

Nous sommes en 2021. Ce roman, cette somme, devrait-on dire, sommes-nous encore capables de bien le comprendre ?  Intéressant et émouvant.

Yaël

Ce premier roman touffu retrace l’histoire des Juifs américains qui sont partis par idéalisme en Russie après la révolution d’Octobre.

Ce qui est intéressant dans le livre c’est qu’à travers trois générations de personnages il révèle des aspects sur l’histoire des Juifs d’Union soviétique (théâtre juif, comité antifasciste), sur la relation entre Staline  et Roosevelt et  sur l’attitude ambigu de celui-ci vis-à-vis des Soviétiques.

Le livre est alimenté par  les évènements historiques et sur l’abondante bibliographie citée en fin d’ouvrage.

Ce livre a une construction littéraire sur une énigme qu’on a de cesse de  découvrir.

Les histoires qui se mêlent en flash-back donnent un rythme au livre et un plaisir au lecteur.

Ce roman débuté au début du 20ème siècle se poursuit  jusqu’à nos jours et intéresse les nouvelles couches de lecteurs car les plus jeunes peuvent se reconnaitre dans les personnages de la dernière génération. Il y a deux clés de lecture qui satisfont deux lectorats, un trentenaire et la génération plus âgée et son histoire personnelle. Tout le monde y trouve son compte. C’est passionnant et instructif.

 

 

Et toujours disponible les indispensables de février

MOI, DITA KRAUS, LA BIBLIOTHECAIRE D’AUSCHWITZ

Dita Kraus

Michel Lafon, 411 pages

Le titre laisse entendre qu’il y aurait eu une bibliothèque à Auschwitz ! Ce qui est faux, bien entendu. A quoi fait-il donc référence ? A quelques lignes dans le texte. C’est donc un titre « accrocheur » inapproprié pour ce sujet. Le titre original est « A DELAYED LIFE », c’est-à-dire une vie retardée.

Ce texte autobiographique raconte la vie de Dita Kraus, née à Prague en 1929. Déportée avec toute sa famille à Therezin, elle passera par plusieurs camps avec sa mère avant la libération par les Anglais. Seule rescapée, elle partira en Israël avec un groupe de jeunes.

Dita Kraus a gardé intacts ses souvenirs d’enfance et d’adolescence ; c’est tout l’intérêt du livre. Elle se souvient avoir été choyée et protégée, sa mère étant restée à ses côtés aussi longtemps qu’elle a pu : elle meurt quelques semaines après la libération des camps. Restée seule et perdue, Dita sera à nouveau prise en charge.

Ce récit, écrit avec un grand détachement, montre bien que les adolescents, aidés et encouragés par les déportés adultes, vivaient la déportation à leur façon, avec une certaine dose d’inconscience qui leur permettait de survivre.

PARTAGES

André Markowicz

Incultes, 444 pages

Le sous-titre indique que ce livre est un recueil de chroniques tenues entre 2013 et 2014.

Bien qu’écrites il y a six ans, ces chroniques n’en sont pas moins intéressantes : les sujets évoqués n’ont que peu de rapport avec l’actualité. André Markowicz nous plonge dans ses préoccupations de traducteur, de découvreur de littérature russe. Il se livre à nous à cœur ouvert, avec  naturel et simplicité. Cet ouvrage ne nécessite pas une lecture suivie. Bien au contraire : on l’ouvre à n’importe quelle page, et on a la surprise de tomber sur un poème de Daniil Kharms, ou sur des considérations concernant Israël, ou bien encore sur l’histoire de sa famille lors du siège de Saint-Petersbourg (Leningrad). C’est à la fois riche et foisonnant.

A découvrir.

LES OXENBERG et les BERNSTEIN    

Catalin Mihuleac

Editions Noir sur Blanc, 304 pages

C’est l’histoire d’une famille de juifs américains les Bernstein qui a réussi à Washington dans les années 1970 grâce au commerce en gros de  vêtements vintage.

Soixante ans plutôt les Oxenberg achèvent de se hisser parmi la bonne société de Iași en Roumanie, Jacques le père est le meilleur obstétricien de la région, ils ont deux enfants, mais dehors les voix de la haine se mettent à gronder.

En 2001 Dora Bernstein et son fils Ben se rendent à Iași, et les deux histoires vont se rencontrer  entre zones d’ombres de la mémoire collective et secrets de famille

L’auteur avec une force narrative très originale et imparable évoque l’un des plus grands tabous de l’histoire roumaine contemporaine, le pogrom de Iași le 29 juin 1941.

On a du mal à interrompre la lecture du livre tant l’auteur nous souffle le chaud et le froid: on a souvent envie de rire et parfois de pleurer quand on suit pas à pas la sinistre journée d’été qui a abouti à la destruction d’une partie de la communauté juive de Iași.

UNE MAISON TRES SPECIALE

Maurice Sendak

Mémo, 30 pages

Maurice Sendak est mort il y a quatre ans. De son vivant, il était reconnu comme le plus grand illustrateur de littérature jeunesse américain, voire mondial.

Né dans une famille juive venue de Pologne, il a débuté très jeune, en mettant en scène des enfants pleins de gaieté et d’imagination. Peu ou pas de couleur, pas d’arrière-plan ; de simples silhouettes d’enfants rieurs ou jouant la comédie, laissant libre cours à leur imagination.

Au fur et à mesure qu’il gagnait en célébrité, il a abordé des sujets plus divers, et parfois plus graves, comme dans l’album « On est tous dans la gadoue », sur la misère et la pauvreté. Dans le même temps, il a radicalement changé de technique, s’inspirant de peintres européens. Son album le plus célèbre est sans doute « Max et les Maximonstres ».

Les éditions Mémo viennent de rééditer un album de sa première inspiration. Il s’agit de « Une maison très spéciale », écrit par une de ses complices Ruth Krauss. Ce qui rend cet album irrésistible, c’est sa traduction : Françoise Morvan a réussi un tour de magie, donnant au texte français la légèreté, la musicalité et la vivacité du texte américain. L’accord entre le texte et l’image est une telle réussite que l’on pourrait croire qu’il s’agit du texte original. Saluons une fois de plus le génie de Sendak, ce fin observateur de l’enfance.

Magnifique album

Nos sélections récentes

Bibliothèque Centre Medem

Et aussi les plus anciennes sélections de la bibliothèque

Les livres de janvier – février 2021

MOI, DITA KRAUS, LA BIBLIOTHECAIRE D’AUSCHWITZ

Dita Kraus

Michel Lafon, 411 pages

Le titre laisse entendre qu’il y aurait eu une bibliothèque à Auschwitz ! Ce qui est faux, bien entendu. A quoi fait-il donc référence ? A quelques lignes dans le texte. C’est donc un titre « accrocheur » inapproprié pour ce sujet. Le titre original est « A Delayed Life », c’est-à-dire une vie retardée.

Ce texte autobiographique raconte la vie de Dita Kraus, née à Prague en 1929. Déportée avec toute sa famille à Therezin, elle passera par plusieurs camps avec sa mère avant la libération par les Anglais. Seule rescapée, elle partira en Israël avec un groupe de jeunes.

Dita Kraus a gardé intacts ses souvenirs d’enfance et d’adolescence ; c’est tout l’intérêt du livre. Elle se souvient avoir été choyée et protégée, sa mère étant restée à ses côtés aussi longtemps qu’elle a pu : elle meurt quelques semaines après la libération des camps. Restée seule et perdue, Dita sera à nouveau prise en charge.

Ce récit, écrit avec un grand détachement, montre bien que les adolescents, aidés et encouragés par les déportés adultes, vivaient la déportation à leur façon, avec une certaine dose d’inconscience qui leur permettait de survivre.

PARTAGES

André Markowicz

Incultes, 444 pages

Le sous-titre indique que ce livre est un recueil de chroniques tenues entre 2013 et 2014.

Bien qu’écrites il y a six ans, ces chroniques n’en sont pas moins intéressantes : les sujets évoqués n’ont que peu de rapport avec l’actualité. André Markowicz nous plonge dans ses préoccupations de traducteur, de découvreur de littérature russe. Il se livre à nous à cœur ouvert, avec  naturel et simplicité. Cet ouvrage ne nécessite pas une lecture suivie. Bien au contraire : on l’ouvre à n’importe quelle page, et on a la surprise de tomber sur un poème de Daniil Kharms, ou sur des considérations concernant Israël, ou bien encore sur l’histoire de sa famille lors du siège de Saint-Petersbourg (Leningrad). C’est à la fois riche et foisonnant.

A découvrir.

Art Nouveau

Paul Greveillac 

Gallimard, 288 pages

Un jeune architecte juif viennois, Lajos Ligeti, s’installe en 1896 à Budapest , bien décidé à se faire une place dans le monde de l’architecture, en pleine effervescence. Ce roman, que l’on peut qualifier d’historique, même si son personnage principal est de pure fiction, nous fait croiser des personnages de renom, architectes, peintres, musiciens.

De toute évidence, l’auteur s’est appuyé sur une abondante documentation pour écrire son roman qui fourmille de détails, autant politiques qu’architecturaux. Ce jeune architecte  rencontrera sur son chemin un maître d’œuvre qui l’aidera à donner corps à ses créations, une femme et surtout des concurrents. L’antisémitisme n’est bien sûr pas absent.

S’il y a abondance de détails et d’informations sur le monde de l’architecture à Vienne, Prague et Budapest, cela ne suffit pas pour faire un roman exceptionnel. L’intrigue est assez mince et pas très crédible, le style affecté.

Ce livre est malgré tout intéressant pour les lecteurs qui s’intéressent au monde de l’architecture et il donne aussi  envie de visiter ou de revisiter ces villes.

LES OXENBERG et les BERNSTEIN    

Catalin Mihuleac

Editions Noir sur Blanc, 304 pages

C’est l’histoire d’une famille de juifs américains les Bernstein qui a réussi à Washington dans les années 1970 grâce au commerce en gros de  vêtements vintage.

Soixante ans plutôt les Oxenberg achèvent de se hisser parmi la bonne société de Iași en Roumanie, Jacques le père est le meilleur obstétricien de la région, ils ont deux enfants, mais dehors les voix de la haine se mettent à gronder.

En 2001 Dora Bernstein et son fils Ben se rendent à Iași, et les deux histoires vont se rencontrer  entre zones d’ombres de la mémoire collective et secrets de famille

L’auteur avec une force narrative très originale et imparable évoque l’un des plus grands tabous de l’histoire roumaine contemporaine, le pogrom de Iași le 29 juin 1941.

On a du mal à interrompre la lecture du livre tant l’auteur nous souffle le chaud et le froid: on a souvent envie de rire et parfois de pleurer quand on suit pas à pas la sinistre journée d’été qui a abouti à la destruction d’une partie de la communauté juive de Iași.

UNE MAISON TRES SPECIALE

Maurice Sendak

Mémo, 30 pages

Maurice Sendak est mort il y a quatre ans. De son vivant, il était reconnu comme le plus grand illustrateur de littérature jeunesse américain, voire mondial.

Né dans une famille juive venue de Pologne, il a débuté très jeune, en mettant en scène des enfants pleins de gaieté et d’imagination. Peu ou pas de couleur, pas d’arrière-plan ; de simples silhouettes d’enfants rieurs ou jouant la comédie, laissant libre cours à leur imagination.

Au fur et à mesure qu’il gagnait en célébrité, il a abordé des sujets plus divers, et parfois plus graves, comme dans l’album « On est tous dans la gadoue », sur la misère et la pauvreté. Dans le même temps, il a radicalement changé de technique, s’inspirant de peintres européens. Son album le plus célèbre est sans doute « Max et les Maximonstres ».

Les éditions Mémo viennent de rééditer un album de sa première inspiration. Il s’agit de « Une maison très spéciale », écrit par une de ses complices Ruth Krauss. Ce qui rend cet album irrésistible, c’est sa traduction : Françoise Morvan a réussi un tour de magie, donnant au texte français la légèreté, la musicalité et la vivacité du texte américain. L’accord entre le texte et l’image est une telle réussite que l’on pourrait croire qu’il s’agit du texte original. Saluons une fois de plus le génie de Sendak, ce fin observateur de l’enfance.

Magnifique album

Et toujours disponible les indispensables de décembre

LA VIE JOUE AVEC MOI

David Grossman

Seuil, 329 pages

Voilà une histoire bien difficile à présenter ! En effet, nous ne voudrions pas la raconter. Par ailleurs, comment dépeindre ces quatre personnages qui se débattent dans des souffrances sans fin ?

Trois femmes, trois générations meurtries : la première, par un long séjour dans un camp de concentration yougoslave. La seconde, sa fille, par « l’abandon » de sa mère. La dernière, enfin, la petite-fille, elle aussi abandonnée par sa mère et élevée par son père et sa grand-mère. Véra (90 ans), Nina, Guili. En compagnie du père de Guili, elles partent en Croatie pour visiter le camp, là où tout a commencé. C’est un voyage dans la mémoire de Véra, dans l’instabilité permanente de Nina et dans l’exacerbation des sentiments de Guili à l’égard de sa mère.

Grossman s’est inspiré d’une histoire vécue. Il a sublimé les personnalités de ses quatre personnages, en faisant ainsi de son intrigue un mouvement permanent dont on croit ne pas voir la fin.

Bonne lecture !

PS  : La traduction m’a parfois gênée

ETOILES VAGABONDES

Sholem Aleichem, trad. du yiddish par J Spector

Tripode, 600 pages 

Les éditions Tripode nous offrent un beau cadeau de Hanoukah :  la traduction d’un feuilleton paru à New-York entre 1909 et 1911. Jean Spector a accompli un travail irréprochable.

Etabli en Amérique à partir de 1905,  Sholem Aleichem, inspiré par son expérience, peint une vaste fresque du théâtre yiddish. Depuis les troupes ambulantes qui parcouraient les routes et les chemins de l’Europe de l’Est, jusqu’à leur installation à New York. C’était là qu’il fallait être. La jeunesse aspirait à la célébrité, les directeurs de théâtre à la richesse.

On retrouve dans ce chef-d’oeuvre tout ce qui fit le succès de son auteur : la langue yiddish, en majesté ; sa saveur, ses expressions, son humour, ses jurons inimitables et variés… Les personnages typiques du shtetl, avec leur statut bien établi (le pauvre chantre, le riche « entrepreneur »). Ce ne sont pas des stéréotypes, ils sont complexes, parfois même roués, se débattent dans des soucis bien réels, avec leurs qualités et leurs défauts ; Sholem Aleichem les aime tous ; nous aussi. Quant à elle l’intrigue est pleine de surprises (n’oublions pas qu’il s’agit d’un feuilleton), de détours pittoresques, mais elle est bien plus que cela : c’est une vision réaliste d’un changement d’époque lequel imprègne le théâtre. Celui-ci va se professionnalisant. La chansonnette, le vaudeville simpliste, vont peu à peu faire place à la véritable comédie musicale et au texte littéraire.

Cette œuvre maîtresse est une véritable découverte pleine de richesses à savourer lentement, pour en apprécier toutes les facettes.

Nos sélections récentes

Bibliothèque Centre Medem

Et aussi les plus anciennes sélections de la bibliothèque

Les livres de nov – déc 2020

IMPOSSIBLE ICI

Sinclair Lewis

La Différence, 377 pages

Première édition parue en 1935 sous le titre « Impossible here »

Prix Nobel de littérature, Sinclair Lewis a écrit cette fable alors même que Hitler était sur le point de prendre le pouvoir. A la question de savoir si un tel évènement pourrait se passer aux Etats-Unis, sa réponse fut « OUI ». C’est ce que cette fable veut montrer. L’auteur s’attache tout particulièrement à la situation des classes moyennes, à leur grande porosité aux idées simplistes et dangereuses.

Cela ne vous rappelle-t-il rien ?

Vous serez surpris par la finesse des analyses et par l’intemporalité des populistes. Toujours les mêmes slogans, toujours les mêmes boucs émissaires, c’est-à-dire les juifs et les « socialo-communistes ».

C’est d’une lecture « édifiante ». Lewis montre parfaitement que la chose la plus difficile à défendre  est bien la démocratie.

Très intéressant

LA VIE JOUE AVEC MOI

David Grossman

Seuil, 329 pages

Voilà une histoire bien difficile à présenter ! En effet, nous ne voudrions pas la raconter. Par ailleurs, comment dépeindre ces quatre personnages qui se débattent dans des souffrances sans fin ?

Trois femmes, trois générations meurtries : la première, par un long séjour dans un camp de concentration yougoslave. La seconde, sa fille, par « l’abandon » de sa mère. La dernière, enfin, la petite-fille, elle aussi abandonnée par sa mère et élevée par son père et sa grand-mère. Véra (90 ans), Nina, Guili. En compagnie du père de Guili, elles partent en Croatie pour visiter le camp, là où tout a commencé. C’est un voyage dans la mémoire de Véra, dans l’instabilité permanente de Nina et dans l’exacerbation des sentiments de Guili à l’égard de sa mère.

Grossman s’est inspiré d’une histoire vécue. Il a sublimé les personnalités de ses quatre personnages, en faisant ainsi de son intrigue un mouvement permanent dont on croit ne pas voir la fin.

Bonne lecture !

PS  : La traduction m’a parfois gênée

ETOILES VAGABONDES

Sholem Aleichem, trad. du yiddish par J Spector

Tripode, 600 pages 

Les éditions Tripode nous offrent un beau cadeau de Hanoukah :  la traduction d’un feuilleton paru à New-York entre 1909 et 1911. Jean Spector a accompli un travail irréprochable.

Etabli en Amérique à partir de 1905,  Sholem Aleichem, inspiré par son expérience, peint une vaste fresque du théâtre yiddish. Depuis les troupes ambulantes qui parcouraient les routes et les chemins de l’Europe de l’Est, jusqu’à leur installation à New York. C’était là qu’il fallait être. La jeunesse aspirait à la célébrité, les directeurs de théâtre à la richesse.

On retrouve dans ce chef-d’oeuvre tout ce qui fit le succès de son auteur : la langue yiddish, en majesté ; sa saveur, ses expressions, son humour, ses jurons inimitables et variés… Les personnages typiques du shtetl, avec leur statut bien établi (le pauvre chantre, le riche « entrepreneur »). Ce ne sont pas des stéréotypes, ils sont complexes, parfois même roués, se débattent dans des soucis bien réels, avec leurs qualités et leurs défauts ; Sholem Aleichem les aime tous ; nous aussi. Quant à elle l’intrigue est pleine de surprises (n’oublions pas qu’il s’agit d’un feuilleton), de détours pittoresques, mais elle est bien plus que cela : c’est une vision réaliste d’un changement d’époque lequel imprègne le théâtre. Celui-ci va se professionnalisant. La chansonnette, le vaudeville simpliste, vont peu à peu faire place à la véritable comédie musicale et au texte littéraire.

Cette œuvre maîtresse est une véritable découverte pleine de richesses à savourer lentement, pour en apprécier toutes les facettes.

SOUS LE SIGNE DU CORBEAU

Amir Gutfreund

Gallimard, 302 pages

Cette histoire commence sous le signe du corbeau, oiseau de malheur : tout accable notre héros sans nom. Il a perdu son travail et son amie. Son père n’est plus là, désormais enterré au cimetière de Haïfa.

Désoeuvré, il écoute la radio et apprend ainsi la disparition d’une jeune fille.

N’ayant rien de mieux à faire, il s’engage parmi les volontaires recrutés pour participer aux recherches. C’est alors que sa vie bascule.

Gutfreund dresse le portrait d’un « innocent » qui s’adapte mal à la société dans laquelle il vit. C’est une personnalité complexe à la fois géniale, selon son frère, tout à la fois naïve et très attachante. Nous suivons donc ses aventures avec empathie et parfois amusement.

Bon roman pour tous

LES POLONAIS ET LA SHOAH, une nouvelle école historique 

Auteurs : Audrey Kichelewski, Judith Lyon-Caen, Jean-Charles Szurek, Annette Wiewiorka

CNRS éditions, 319 pages

Ce recueil reprend les interventions des historiens ayant participé au colloque de février 2019, lequel a eu lieu à l’EHESS. Son sujet : « la nouvelle école polonaise d’histoire de la Shoah ».

Il arrive à point nommé, c’est-à-dire au moment où le gouvernement polonais nationaliste réécrit l’histoire afin de glorifier le comportement héroïque des Polonais durant la guerre.

Le point de départ de cette « controverse » est la sortie du livre de Jan Gross « Les Voisins », sur le massacre de Jedwabne. Pour mémoire, l’auteur a pu démontrer que ce ne sont pas les Allemands qui ont massacré les juifs de la bourgade en les enfermant dans une grange et en les brûlant. CE SONT LES HABITANTS. Les nouveaux historiens « dévoilent » la participation active d’une partie de la population à la chasse aux juifs.

Les Voisins a suscité une onde de choc en Pologne et ses retombées perdurent encore. Les nouveaux historiens polonais s’attachent donc à une rude tâche : s’attaquer à un mur de silence et de déni. Leur enquête va plus loin, car elle montre que l’antisémitisme des campagnes est toujours vivace.

Une œuvre salutaire et qui fera autorité.

Nos sélections récentes

Bibliothèque Centre Medem

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Les livres de sept – oct 2020

LE MONDE D’HIER

Stefan Zweig 

Belles Lettres, 2015, 453 p. 

Ce texte magnifique a été écrit par Zweig juste avant son suicide, en 1941.

Certain que l’Europe allait sombrer, il était sans espoir de la revoir. Lui, cet europhile convaincu, décida de faire un bilan pour les générations futures. Il savait que sa chère Europe ne serait plus jamais la même : sa culture humaniste, sa haute idée de l’éducation, ses artistes, … tout cela n’était plus, décimés par les nouveaux barbares.

Cet essai, écrit au Brésil sans la moindre note, sans le secours de tout ce que Zweig avait pu accumuler comme correspondances, comme textes des penseurs de son temps, est d’une fluidité, d’une clarté remarquable. De nombreuses réflexions restent d’actualité et peuvent encore nous donner matière à réflexion… Par sa modestie, sa pondération, sa sensibilité, sa clairvoyance, Zweig nous aide encore aujourd’hui.

Remarquable

RACHEL ET LES SIENS

Metin Arditi

éd. Grasset, 504 pages

Surtout, pas d’affolement : ces 504 pages se lisent très facilement…

Metin Arditi, écrivain suisse d’origine turque, nous dépeint une personnalité hors du commun, à tous égards :

Rachel naît dans une famille juive arabe, laquelle partage une maison avec une famille arabe musulmane. Nous sommes à Jaffa, en 1917 lorsque l’histoire commence. Elle se termine en 1982 avec la mort de Rachel l’impétueuse, surnommée Rachel Pacha. Durant toute son existence, au demeurant très mouvementée (trois mariages, trois lieux de vie très différents où les juifs n’ont pas la vie facile), elle fait preuve d’une force de caractère, d’une détermination à vivre libre sans faille. Des drames jalonnent sa vie, mais elle se redresse à chaque fois.

A travers ce roman à l’intrigue foisonnante, c’est le destin de tout un peuple, ou plutôt de DEUX peuples, palestinien et israélien que Metin Arditi interroge sans prendre parti.

Roman captivant

LES MULLER

Walter Mehring

Belles Lettres, 1934, 294 pages

Ecrit vers 1934, ce roman retrace l’arbre généalogique d’une famille allemande banale, depuis le 14e siècle jusqu’en 1933. Banale, certes, mais tellement typique ! Les livres de Mehring finiront sur le bûcher nazi.

Mehring, célèbre en son temps car satiriste redoutable, a trempé sa plume dans un acide corrosif pour dépeindre ces Germains dont chaque génération va vivre des aventures farfelues, grotesques et déstabilisantes : habitués qu’ils sont à obéir, à respecter la loi et l’ordre, ils sont bien incapables de tirer les leçons de l’Histoire !

Cette vaste farce ira à son terme, le dernier des Müller ayant épousé une juive, ne comprendra pas ce qui lui arrive, bon nazi et fier de l’être !

Roman drôlatique par le sérieux et le mépris avec lequel Mehring traite son sujet.

APRES LA GUERRE

Hervé Le Corre

éd. Rivages, 575 pages.

Ce polar figure dans nos propositions de lecture car nous avons un fonds Romans policiers.

L’histoire se passe à Bordeaux, dans l’immédiat après-guerre : un « revenant » des camps vient régler ses comptes dans cette ville où se sont côtoyer des truands, des flics pourris, de petits malfrats sans envergure, tels Jean Delbos. Olga sa femme est juive et ils ont un petit garçon âgé de sept ans, Daniel,  au moment où a lieu la rafle. Jean fait grimper Daniel sur le toit. Des amis, avertis, doivent passer le chercher.

Jean et Olga se font prendre, mais Olga ne reviendra pas.

Ce roman est remarquable de par la qualité de l’écriture. Il est assez rare de savourer un texte aussi bien ciselé, voire recherché ; les ruptures de style sont en parfaite adéquation avec l’intrigue. Les analyses psychologiques très fines, les personnages bien campés,..

Un très grand plaisir de lecture.

LISE ET LES HIRONDELLES

Sophie Adriansen

Nathan, 238 pages (pour les Ados)

En cet été 1942, Lise, alors âgée de 13 ans, est la seule de sa famille à avoir échappé à la rafle. Ses parents et ses deux jeunes frères jumeaux ont été pris et emmenés au commissariat de la porte des Lilas. Sans réfléchir, Lise traverse Paris pour se rendre porte des Lilas. Par son aplomb, elle parvient à récupérer ses petits frères âgés de huit ans… Mais pas ses parents.

Les trois enfants sont recueillis par des voisins généreux qui les prennent en charge.

Basée sur un témoignage, cette histoire très émouvante, racontée sans pathos, permettra aux enfants d’imaginer ce que fut la vie de ses trois enfants qui ont eu l’immense chance d’être recueillis et choyés durant toute la guerre.

Excellent roman (à partir de onze ans).

JE SUIS L’ARGILE

Chaïm Potok

JC Lattès, 281 pages, 1993

Au hasard des recherches, nous avons découvert ce beau roman, que Potok a écrit à la suite de son expérience d’aumônier durant la guerre de Corée :

La fin de la guerre est proche ; les avions américains pilonnent le pays, jetant sur les routes des milliers de réfugiés. Parmi eux, un vieux couple de paysans traînant une charrette contenant un sac de riz, quelques couvertures usées, et quelques ustensiles de cuisine. Et voilà que dans un fossé, la vieille aperçoit un enfant gravement blessé ; visiblement, il est seul, abandonné. N’ayant pas eu d’enfant, elle ressent le besoin de l’aider, contre l’avis de son grincheux de mari.

A partir de cette histoire très simple, Potok nous raconte une fable touchante, peine de sensibilité. Mais dans le même temps, il sait recréer la vie de tous ces pauvres gens jetés sur les routes, en plein hiver ; leur quotidien se résume à marcher, trouver un abri pour la nuit, chercher du petit bois et avaler un bol de neige fondue agrémentée d’herbes sauvages… Mais pour aller où ?

Dans cette immense misère, il y a encore place pour un peu de « menschlechkeit », malgré tout.

Très bien

LA MORT DU KHAZAR ROUGE

Shlomo Sand

Seuil, 381 pages

Shlomo Sand est un historien israélien controversé dans son propre pays. Dans ce roman, il popularise ses thèses, tout en réglant certains comptes avec le milieu universitaire israélien, trop conformiste à ses yeux :

La police doit résoudre quatre crimes ayant eu lieu dans le monde universitaire. Au départ, les recherches sont infructueuses. Durant quelques années, la mort des deux frères Litvak reste une énigme. Dans l’intervalle, le policier arabo-palestinien Morkus a pris sa retraite. Lorsque deux autres crimes ont lieu dans la même université de Tel-Aviv, c’est la sagacité d’un ancien collaborateur de Morkus qui lui permet d’établir un lien entre toutes ces affaires…

Les professeurs étant des gens comme les autres, ils sont en proie à des sentiments de jalousie, d’envie, liés à la compétition pour avoir les meilleures places. Et tout comme ailleurs, ils sont parfois aidés par des services de l’état aveuglés par leur idéologie.

Pas mal ficelé.

Un long moment de silence

Paul Colize

Gallimard, 512 pages

En 1960, pendant une émission littéraire à laquelle il est invité pour son dernier livre, Stanislas reçoit un coup de téléphone qui bouleverse tout ce qu’il croyait savoir sur son père.

De son côté, en 1948, Nathan Katz, jeune juif rescapé des camps, part pour New-York pour essayer de se reconstruire.

Il est repéré par une organisation “Le Chat” dont l’objectif est de retrouver les nazis qui ont participé à l’Holocauste.

Nathan et Stanislas vont-ils finir par se croiser ?

Paul Colize est né en 1953 à Bruxelles.
Auteur de romans noirs, il a écrit une douzaine de livres, dont Back Up, paru en 2012 (Prix Saint Maur en poche 2013) et Un long moment de silence paru en 2013, qui a remporté la même année trois récompenses : Prix Landerneau Polar, Prix Boulevard de l’Imaginaire et Prix Polars Pourpres.

1947 : l’année où tout commença

Elisabeth Asbrink

10/18, 309 pages

Parmi les nombreux évènements qui ont eu lieu en 1947, l’auteure a fait un choix très personnel pour établir un lien avec sa propre histoire, ou plutôt avec celle de son père : Joszef, vit alors dans un camp de réfugiés ; son père est mort, sa mère est sur le point de le retrouver afin d’émigrer en Suède. Joszef peut choisir entre partir avec sa mère, ou être pris en charge par une œuvre caritative afin de suivre ses études dans sa langue maternelle. L’activisme des sionistes lui permettrait aussi de partir en Palestine…

Cet inclassable est à notre avis assez décevant : il fait la part trop belle aux évènements, racontés de façon distante, factuelle, sans que l’on perçoive ce qui les rattache à l’histoire familiale. Si bien que cela devient lassant (en quoi l’histoire d’amour de Simone de Beauvoir avec Nelson Algren est intéressante ? Simone achetant des escarpins rouges à New York est-ce intéressant ?).

Je me demande si ce n’est pas une affaire de style… ou de traduction.

En outre, la part personnelle, c’est-à-dire celle consacrée à son père est réduite à bien peu de lignes…

« Roman » peu convaincant

ABAHN  SABANA DAVID

Marguerite Duras

Gallimard, 118 pages

Dans ce roman souvent présenté comme hermétique, Duras met en scène quatre personnages. Le titre du livre n’en comporte que trois. A nous d’en trouver la raison. Construit  comme une pièce de théâtre, tout en dialogues, ce court roman évoque la condition juive après la guerre. Gringo (Staline ?) fait la guerre aux juifs, ces traîtres. David est chargé d’en éliminer un : Abahn Sabana est chargée de surveiller David, afin qu’il ne flanche pas.

Mais à partir du moment où l’on accepte de parler ensemble, tout peut arriver…

Ces dialogues courts, faits de banalités dont on ne perçoit pas l’objet ni le but, masquent la pensée de Duras la désenchantée.

A méditer

DU NOUVEAU DANS LE RAYON CONSACRE AU YIDDISH

Grâce à  Salomon Bielasiak qui nous a régalé lors de ses réunions zoom durant le confinement, nous avons eu l’occasion de re-découvrir les expressions et proverbes savoureux de la langue yiddish, .

Cela nous a donné l’idée de vous proposer quelques livres venus d’Amérique pour étayer ces leçons magistrales.

Nous ferons d’autres acquisitions prochainement, mais pour commencer, voici trois titres pour commencer :

  • Hanan AYALTI : Yiddish proverbs, the essence of yiddish Wit and Wisdom, Shocken Books, 1965 (assorti de quelques gravures sur bois)
  • Shirley KUMOVE : Words like arrows, a treasury of yiddish folks sayings ; Warner Books, 1986
  • Bella LAURENCE : Sail’houle, sagesse yiddish dans la tradition juive, Pierre Bordas, 1986

Ces trois livres sont écrits en yiddish et en version latinisée, et traduits en anglais et en français pour le dernier.

Nos sélections récentes

Bibliothèque Centre Medem

Et aussi les plus anciennes sélections de la bibliothèque

Les livres de mai- juin 2020

Diaporama des livres de la rentrée

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LA RAFLE DES NOTABLES

Anne Sinclair

Grasset, 119 pages

En décembre 1941, les allemands arrêtent 743 juifs français, notables, dont le grand père d’Anne Sinclair qu’ils internent dans le camp de Compiègne.

En recherchant comment son grand père paternel, Léonce Schwartz, a échappé à la déportation, elle relate un chapitre peu connu de la persécution des juifs.Ils seront déportés par le premier convoi du 27 mars 1942. Les allemands ajouteront à ce convoi 300 juifs étrangers internés à Drancy depuis les 20 et 21 août 1941.

Extrait du Monde du 2 mai :

« Je ne suis pas historienne », dit-elle.

« Je n’avais pas d’archives familiales sur lui. Alors je suis partie à l’enquête »…

« Cette rafle, je veux qu’on la connaisse »…

« Par mon métier, j’ai probablement voulu prolonger l’histoire que je n’ai pas vécue par l’histoire que je vivais, donner à voir et à comprendre l’histoire en train de se faire. Plus on vieillit, plus on se retourne vers son passé, ses racines. »

Anne Sinclair continue, autrement, en remontant à la source, à observer le monde se faire et se défaire. Et à transmettre, pour lutter, désormais, contre l’érosion de la mémoire, ou cette incuriosité qui lui a si longtemps masqué le destin de Léonce Schwartz, et des raflés de Compiègne.

 

Un long moment de silence

Paul Colize

Gallimard, 512 pages

En 1960, pendant une émission littéraire à laquelle il est invité pour son dernier livre, Stanislas reçoit un coup de téléphone qui bouleverse tout ce qu’il croyait savoir sur son père.

De son côté, en 1948, Nathan Katz, jeune juif rescapé des camps, part pour New-York pour essayer de se reconstruire.

Il est repéré par une organisation “Le Chat” dont l’objectif est de retrouver les nazis qui ont participé à l’Holocauste.

Nathan et Stanislas vont-ils finir par se croiser ?

Paul Colize est né en 1953 à Bruxelles.
Auteur de romans noirs, il a écrit une douzaine de livres, dont Back Up, paru en 2012 (Prix Saint Maur en poche 2013) et Un long moment de silence paru en 2013, qui a remporté la même année trois récompenses : Prix Landerneau Polar, Prix Boulevard de l’Imaginaire et Prix Polars Pourpres.

Cet été-là à Blumental 

Ursula Werner

Mercure de France, 326 p.

Blumental, 1944, à la frontière entre l’Allemagne et la Suisse. Il n’est pas encore sûr que l’Allemagne perde la guerre, mais certains Allemands le croient. La famille Eberhardt fait partie des « notables » de cette petite ville : Oscar, le patriarche est ministre de Hitler. Il semble ignorer que tant sa femme Edith que sa fille Mariana n’ont que mépris pour le Führer. Ses trois petites filles vivent heureuses dans cette famille unie. Deux autres personnalités se mêlent à eux : Erich, le fils adoptif secrètement amoureux de Mariana, officier loyal et droit ; ainsi que Johann, prêtre protestant passé à la résistance. Lui aussi a un faible pour Mariana … A l’occasion d’une visite du Führer, tout s’enclenche pour mener à une catastrophe…

Ce roman limpide dresse le portrait de plusieurs personnes très attachantes dont tout laisse à penser qu’elles ont pour modèles des membres de la famille de l’auteur. La description d’une petite bourgade loin de Berlin est nuancée mais Ursula Werner s’attache surtout à décrire l’opposition à Hitler. D’autres romans allemands font un tableau plus dur (et plus réaliste ?) de ces Allemands de l’intérieur…

Bon roman

Le Cauchemar

Hans Fallada

Denoël, 320 pages

En 1945, après la chute de l’Allemagne, Herr Doll, hostile au régime nazi, est désigné par les russes maire par intérim d’une petite ville.

Il dénonce les anciens nazis et de ce fait il est persécuté par certains de ses administrés.

Il est contraint de s’exiler et avec son épouse ils partent se réfugier à Berlin.

Malgré toutes les difficultés de l’après guerre, ils entreprennent de se reconstruire…

Cette oeuvre, la plus personnelle d’Hans Fallada, n’était plus disponible depuis plus de soixante ans. Elle est proposée ici dans une nouvelle traduction.

les Lumières de Tel-Aviv

Alexandra Schwartzbrod

Rivages/Noir, 285 pages

Dans ce livre de fiction, Alexandre Schwartzbrod imagine que les religieux ont pris le pouvoir à Jérusalem pour former le Grand Israël.

Les résistants, laïcs juifs et arabes se sont regroupés à Tel-Aviv pour vivre selon les préceptes des premiers Kibboutzim.

Mais un nouveau mur fait son apparition entre Tel-Aviv et Jérusalem, surveillé par des robots tueurs.

Haïm, un ultra-orthodoxe, Moussa et Malika, deux jeunes palestiniens, Ana, la femme d’un religieux, Isaac, conseiller du premier ministre et Eli, un ex commissaire de police cherchent à franchir le mur…

MARTHA FREUD

Katja Behling

Albin Michel, 292 pages

Restée dans l’ombre de son Grand Homme de mari, Martha Freud mérite pourtant que l’on s’intéresse à elle : cette jeune fille orthodoxe très pieuse a dû renoncer à pratiquer son judaïsme, pour l’amour de son mari. En effet, Freud se disait juif athée. Il a imposé sa vision à sa femme. De même qu’il considère les femmes en général comme devant s’occuper du foyer et des enfants. Ce à quoi s’emploiera Martha durant toute sa vie : elle se consacrera à la carrière de Freud et à leurs six enfants, tâchant de lui éviter tout souci domestique. En outre, elle saura aussi se montrer diplomate afin de sauvegarder les amitiés de son mari parfois emporté par la passion… Cela dit, les recherches menées par Freud ne l’intéressaient nullement.

On le voit, Martha fut une femme courageuse et toute entière dévouée à la cause d’un Freud pas toujours aimable ; le livre évoque aussi les curieuses relations qu’eut Freud avec sa belle-sœur, mais sans rien laisser entendre sur la réaction de Martha.

Biographie sobre et écrite d’une plume alerte.

L’ETOILE NOIRE

Michèle Maillet,

François Bourin, 229 pages

La déportation des Noirs durant la Seconde Guerre Mondiale est peu présente dans le domaine romanesque. Ce roman vient donc combler un vide : Sidonie, jeune Antillaise travaillant chez une famille mixte est raflée avec ses deux jumeaux, en même temps que ses employeurs. Elle fait le récit de son long voyage vers un premier camp, puis vers un autre. Au cours de sa déportation, elle perd la trace de ses deux enfants âgés de cinq ans ; elle subit aussi le racisme, en plus des tortures. Bandant toutes ses forces pour résister au désespoir, elle se raccroche à sa culture antillaise et à une amie solide.

Basée sur de nombreux livres d’histoire et autres documents, ce récit écrit avec beaucoup de simplicité est intéressant.

DU NOUVEAU DANS LE RAYON CONSACRE AU YIDDISH

Grâce à  Salomon Bielasiak qui nous a régalé lors de ses réunions zoom durant le confinement, nous avons eu l’occasion de re-découvrir les expressions et proverbes savoureux de la langue yiddish, .

Cela nous a donné l’idée de vous proposer quelques livres venus d’Amérique pour étayer ces leçons magistrales.

Nous ferons d’autres acquisitions prochainement, mais pour commencer, voici trois titres pour commencer :

  • Hanan AYALTI : Yiddish proverbs, the essence of yiddish Wit and Wisdom, Shocken Books, 1965 (assorti de quelques gravures sur bois)
  • Shirley KUMOVE : Words like arrows, a treasury of yiddish folks sayings ; Warner Books, 1986
  • Bella LAURENCE : Sail’houle, sagesse yiddish dans la tradition juive, Pierre Bordas, 1986

Ces trois livres sont écrits en yiddish et en version latinisée, et traduits en anglais et en français pour le dernier.

PARTIR

au-delà des frontières

Francesca Sanna, Gallimard jeunesse

Une famille du Moyen-Orient (Syrie ?) est contrainte de fuir à la suite de la mort du père. Composée d’une jeune mère et de ses deux enfants, elle entame un très long voyage, parcourant à pied, en voiture, en autocar des régions européennes inconnues, recelant mille dangers. Traversant clandestinement les frontières, cette mère courageuse et ses enfants ont l’impression que ce voyage ne finira jamais…

Le texte est bref, sans pathos, mais ce sont les illustrations où le noir et le brun représentent le danger qui rendent compte de la peur…

Excellent album à commenter en famille.

LE VOYAGE EN POISSON

Tom Seidmann-Freud,

éd. Albin Michel et BNF, 36 pages, ill. coul.

La première édition de cet album date de 1923. A cette époque, Tom Seidmann-Freud est très connue, non parce qu’elle est la nièce de Freud, mais en tant qu’artiste, créatrice de livres pour enfants.

Cette histoire raconte comment Peregrin, plongé dans un rêve, fait un long voyage sur le dos de son poisson rouge et parvient dans un pays utopique… L’auteur-illustratrice s’inspire des courants de la peinture allemande de l’époque. Rigueur des grands aplats, palette de couleurs limitée, mais aussi très grande lisibilité, associée à une distanciation du réel. Le texte fait une grande place à un quotidien idéalisé, jusqu’à la chute finale.

Très bel album.

UNE CURIOSITE DANS LA LITTERATURE ENFANTINE 

Et toujours disponible à la bibliothèque

la sélection des mois précédents

Les livres de Mars – Avril 2020

Les choses humaines

Prix Interallié 2019 & Prix Goncourt des Lycéens 2019 

Karine Tuil

Gallimard, 352 pages

Karine Tuil nous présente dans la première partie de ce roman,  les Farel un couple de pouvoir (politique et littéraire). Jean est un célèbre journaliste politique français ; son épouse Claire est connue pour ses engagements féministes et se libérant de l’emprise du mariage pour vivre une histoire d’amour intense avec un professeur de confession juive. Ensemble, ils ont un fils, étudiant dans une prestigieuse université américaine. Tout semble leur réussir.

Dans la 2ème partie, on entre dans l’accusation de viol qui va faire vaciller ce monde “parfait”. Une réflexion d’actualité avec le mouvement #Me Too, les réseaux sociaux et leur influence néfaste sur une procès puisqu’un individu est jugé coupable avant même son procès car les réseaux sociaux influencent inexorablement un verdict.

Karine Tuil s’interroge sur le monde contemporain, démonte la mécanique impitoyable de la machine judiciaire et des réseaux sociaux.

Très bon roman, captivant, au coeur de l’actualité, bien écrit et que l’on n’a pas envie de quitter avant la dernière page.

Nous n’avons pas vu passer les jours

Simone Schwarz-Bart et Yann Plougastel 

Grasset, 208 pages

 

Simone Schwart-Bart, aidée de la plume de Yann Plougastel, journaliste au Monde, nous raconte  sa rencontre avec André et  ses années de vie commune ; elle nous donne à connaître plus intimement l’auteur du « Dernier des justes » et les tourments qui ont accompagné sa vie.

Le récit commence par la rencontre très improbable entre un juif d’origine polonaise, dont les parents ont été déportés, et une jeune guadeloupéenne. Quelques mois après cette rencontre, André Schwarz-Bart, reçoit le prix Goncourt pour « Le dernier des justes ».  Après ce prix et la rencontre de celle qui deviendra sa femme, il va vouloir rapprocher dans son œuvre le destin des juifs et celui des esclaves des Antilles. Il souffrira beaucoup de l’incompréhension qui accueillera ses nouvelles publications .

Lecture passionnante, qui donne envie de relire André Schwarz-Bart.

Le grand royaume des ombres

Arnaud Geiger

Gallimard, 496 pages

Ce récit, dont l’action est concentrée derrière les lignes de front de la seconde guerre mondiale, et en particulier autour du village bordé du lac de Mondsee en Autriche, est un recueil de témoignages de personnages qui ont croisé le parcours de Veit, soldat viennois en convalescence qui tient un carnet. Les décrets arbitraires, les brimades et coups durs liés à la guerre, minent sans cesse la vie des civils et le lecteur éprouve vite de l’empathie pour les témoins et tous ceux qui vivent à l’ombre des combats.

Est dressé un portrait particulièrement vivant des conditions de vie de l’époque qui, aussi dures soient-elle, n’excluent pas de son champ, la tendresse. On suit ainsi le soldat Veit et sa voisine Margot tisser des liens plus lumineux.

Les histoires des différents témoins diffèrent pour autant dans leurs résolutions. On découvre ainsi une famille juive viennoise qui d’obstacles en obstacles tente d’émigrer en Hongrie.

Mikado d’enfance

Gilles Rozier

L’Antilope, 192 pages

Ce livre raconte le retour sur un évènement de la vie de l’auteur, survenu au début de son adolescence, et qui lui a été douloureusement rappelé à la mémoire à son âge adulte, alors qu’il est devenu professeur de yiddish et d’hébreu.

Cet évènement est son implication à la transmission d’un message à caractère antisémite à son professeur d’anglais de l’époque. Cet évènement, qu’il a d’abord refoulé, il va essayer d’en retrouver les pièces, et essayer de déterminer ce qui l’a motivé dans ce geste à caractère antisémite. Les souvenir de l’époque, tel que son attirance pour les co-accusés, ou son histoire familiale, sont comme des pièces d’un jeu de mikado qui va l’amener à libérer le souvenir coupable.

Ce livre est aussi l’occasion de voir comment un jeune accède à l’histoire du peuple juif à travers des souvenirs ayant traits à ses parents.

AU COMMENCEMENT

Chaïm Potok

Les Belles Lettres, 608 pages

Les Belles lettres ont eu la judicieuse idée de présenter une nouvelle traduction de ce superbe roman.

Dans le New York (le Bronx, plus exactement) des années de l’entre-deux guerres, des familles juives vivent paisiblement, en attendant de pouvoir faire venir leurs proches restés en Pologne. Ces familles ont fondé une association d’entr’aide afin de rassembler l’argent nécessaire à la venue des émigrants. Tous juifs pieux, orthodoxes, ils ont à leur tête Max Lurie et son épouse. Max n’a peur de rien ni de personne, surtout pas des antisémites qui vivent autour d’eux. Dans la famille Lurie on compte deux garçons aussi différents qu’on peut l’être. David, l’aîné est le narrateur. Dans une première partie, il évoque avec force détails touchants son enfance d’enfant toujours malade, ce qui l’oblige à souvent manquer le haider ainsi que les jeux avec ses copains. C’est ce retrait forçé qui forge son caractère : fin observateur, il est en permanence en quête de la vérité des choses de la vie. Son hypersensibilité intériorisée l’isole souvent du monde. C’est ce qui le rend si attachant et parfois bouleversant.

Dans une seconde partie, David termine brillamment ses études. Tous lui prédisent un brillant avenir de rabbin et de philosophe, mais il choisit une autre voie : celle qui le mène à quitter sa communauté (sans rien renier), pour aller se frotter aux savants universitaires. C’est pour lui un nouveau commencement, au cours duquel il va se recueillir à Bergen Belsen, là où sa famille a été massacrée. Pour sa famille et ses amis, c’est un peu un reniement.

Magnifique roman d’apprentissage.

Les modifications

Sayed Kashua

L’Olivier, 250 pages

Traduction de l’hébreu par Jean-Luc Allouche

Ce récit, qui relève de l’autobiographie, raconte le retour sur soi d’un écrivain arabe israélien, un « nègre », qui après avoir migré aux Etats-Unis doit revenir en Israël au chevet de son père mourant, et ainsi se reconnecter avec la vie qu’il a fuie.

A travers son récit, nous pouvons observer l’obligation de fidélité à ses origines que s’imposent les arabes de la localité de Tira, la fierté fragile de la population y vivant, et les contradictions que vivent les arabes tentant de s’insérer dans la société israélienne.

L’auteur essayera, tout en se reconnectant avec son passé, de remodeler ses rapports avec les siens comme on apporte des modifications à un texte. Pourtant une faute de jeunesse de l’auteur semble irréparable car elle a motivé tout le reste de sa vie, son exil, et sa vie maritale…

Autobiographie tendre et amère de l’auteur, au style bien travaillé.

Nos sélections récentes

Bibliothèque Centre Medem

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Les livres de Janvier – Février 2020

Les choses humaines

Prix Interallié 2019 & Prix Goncourt des Lycéens 2019 

Karine Tuil

Gallimard, 352 pages

Karine Tuil nous présente dans la première partie de ce roman,  les Farel un couple de pouvoir (politique et littéraire). Jean est un célèbre journaliste politique français ; son épouse Claire est connue pour ses engagements féministes et se libérant de l’emprise du mariage pour vivre une histoire d’amour intense avec un professeur de confession juive. Ensemble, ils ont un fils, étudiant dans une prestigieuse université américaine. Tout semble leur réussir.

Dans la 2ème partie, on entre dans l’accusation de viol qui va faire vaciller ce monde “parfait”. Une réflexion d’actualité avec le mouvement #Me Too, les réseaux sociaux et leur influence néfaste sur une procès puisqu’un individu est jugé coupable avant même son procès car les réseaux sociaux influencent inexorablement un verdict.

Karine Tuil s’interroge sur le monde contemporain, démonte la mécanique impitoyable de la machine judiciaire et des réseaux sociaux.

Très bon roman, captivant, au coeur de l’actualité, bien écrit et que l’on n’a pas envie de quitter avant la dernière page.

L’année des pierres

Rachel Corenblit

Casterman, 413 pages

Ce roman facile à lire s’adresse aux adolescents.

Un groupe de jeunes juifs français “inadaptés” au lycée sont envoyés pour une année scolaire en Israël. Regroupés dans un centre en marge de la vie israélienne, ils s’adaptent peu à peu à leur nouvelle condition. L’un d’eux rencontre son grand-père, un vieux monsieur original qui fait la conquête de ses potes!

A l’occasion d’un voyage en car, ils passent en bordure d’un village palestinien, se font caillasser et leur chauffeur est tué. Cet évènement traumatisant les marque sans doute à jamais.

Roman très nuancé et personnages finement analysés.

Sur les ossements des morts

Olga Tokarczuk

Libretto, 283 pages

Ce roman inclassable (fantastique? policier?) entre en résonnance avec l’actualité : quelle place occupe la vie animale dans le monde des humains?

L’auteure n’y va pas par quatre chemins, mais nous n’en dirons pas plus, afin de ne pas dévoiler le dénouement. L’histoire se passe aux confins de la Pologne, dans un hameau situé en lisière de forêt. Pour habiter là, il faut vraiment être hors norme. C’est bien ce qui caractérise Jajina, ancienne ingénieure, enseignant l’anglais dans une école élémentaire de village. Ses amis? Ils se comptent sur le doigt de la mains. Ses ennemis? Ils sont légion : ce sont les chasseurs. Janina est férue d’astrologie mais n’est considérée que comme une vieille folle. Ses courriers aux diverses autorités ne reçoivent aucune réponse… Les animaux qu’elle défend vont-ils réagir?

A la folie meurtrière des uns répondra une autre folie meurtrière…

La figure de Janina est très attachante, et tout le roman baigne dans une atmosphère où la nature tient le premier rôle.

HAUTS-FONDS

Dov Lynch

éd. Seuil, 190 pages

Vienne, 1945-1989. Personnage principal :Klem policier ayant obtenu son certificat de dénazification. Silencieux, énigmatique et recherché par les Américains et les Russes. Voilà pour le scénario. Plus proche de la fable que de la “réalité”, ce texte met en scène l’Autriche de l’après-guerre, occupée par les Alliés dans une atmosphère de défiance totale. La troisième guerre mondiale se profile à l’horizon et chaque camp compte ses forces.

Progressivement, nous en apprenons un peu plus sur Klem mais sa part d’ombre reste intacte. Au bout du compte, que reste-t-il de cette lecture? Un sentiment troublant : celui de ne pouvoir appréhender ce que fut cette époque d’incertitude, de brouillard, de mensonges, de double jeu. Graham Greene n’est pas loin…

Intéressante démarche littéraire.

SECRET DE POLICHINELLE

Yonatan Sagiv

éd. de l’Antilope, 469pages

Ce premier roman, qui s’apparente à un polar, est une réussite, qui témoigne d’une maîtrise littéraire déjà affirmée. Sous couvert d’une enquête policière, Sagiv nous livre un tableau sans concession de la société israélienne, calquée sur celle de l’Amérique : l’argent est roi, les inégalités sociales importantes, la jeunesse dorée est paumée, …

Oded Hofer, un homosexuel affiché, manque cruellement d’argent. Après avoir fait quelques petits boulots, le voilà installé en tant que détective privé. Sa première cliente est la soeur de l’une des femmes les plus puissantes d’Israël, laquelle vient de mourir. Mort naturelle? suicide? ou plutôt crime? Le commissaire Yaron Malka, homo caché,  mène l’enquête en parallèle.

La crudité de la langue ne fait qu’ajouter à l’aspect humoristique et satirique du texte. 

Intrigue bien ficelée, suspense, rebondissements, tout y est. MAIS la traduction pose problème, en raison d’erreurs répétitives. Dommage! On peut néanmoins faire abstraction de ces maladresses et aller jusqu’au bout.

Les Etoiles de David

Kristina Ohllson

J’ai lu, 605 pages (genre Roman policier)

Ces 600 pages s’avalent sans difficulté, mais ce thriller a un côté dérangeant :

Nous sommes à Stockholm, dans les années 2000, au sein de la communauté juive de la synagogue de Salomon. Elle comporte une école dans laquelle vont être commis plusieurs crimes, signés “le garçon de papier”. Antisémitisme? Règlement de compte? Vengeance? L’enquête s’avère difficile, car les traces sont effacées. Polices criminelles et antiterroriste mènent l’enquête…

Dans une interview, l’auteur a expliqué qu’elle s’intéressait au monde juif en général, et à Israël en particulier. Il s’agit donc d’une sorte d’enquête sociologique sur des immigrés, Israéliens pour la plupart, lesquels ont quitté leur pays pour une terre plus paisible. Ce qui nous semble gênant, ce n’est pas le contexte. C’est la violence de ces crimes commis sur des enfants (sauf un). On notera que les enfants sont peu présents dans le polar en général, comme s’ils étaient intouchables, en raison de leur innocence même.

L’intrigue en elle-même est bien ficelée, les personnages intéressants. Ames sensibles s’abstenir.

KOBA

Robert Littell

Baker Street, 256 pages

Seul au monde après le décès de son père et l’arrestation de sa mère, victime de la purge stalinienne des médecins juifs, Léon (10 ans et demi) se cache du NKVD dans un bâtiment où logent des hauts fonctionnaires.

Il y rencontre un homme âgé : Koba, qui semble connaître mieux que personne le « Camarade Staline » dans ses pensées les plus troublantes. Un dialogue s’instaure entre le vieil homme et l’enfant.

Mais qui est ce vieil homme… ?

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Les livres d’octobre – novembre 2019

A la première personne

Alain Finkielkraut

Gallimard, 128 pages

Dans ce petit livre confession, synthèse de son parcours intellectuel, Alain Finkielkraut fait le point sur les grandes étapes de sa pensée et les auteurs (M. Kundera, ou P. Roth,) qui l’ont construit ou influencé, de ses débuts soixante-huitards à nos jours.

 “Penser est une chose, exister dans ce qu’on pense est autre chose.” (Kierkegaard). C’est cet “autre chose” que l’auteur a voulu mettre au clair en écrivant, une fois n’est pas coutume, à la première personne. 

HEIMAT : loin de mon pays

Nora Krug

Gallimard

Nous avons classé cet ouvrage parmi les romans graphiques, et non en bande dessinée, car il s’apparente plus au récit. L’illustration y est pourtant très présente; une illustration mêlée de photographies familiales.

Nora Krug, jeune femme d’origine allemande, vit à New-York, mais sa famille habite toujours à  Karlsruhe. C’est peut-être la rencontre d’une ancienne déportée qui est le déclic… Toujours est-il qu’elle se lance dans une enquête sur ses origines familiales. Sous-jacente est la crainte d’y retrouver des adhérents au nazisme.

C’est cette crainte, cette angoisse même, qui est profondément émouvante. Nora mène cette enquête de façon méthodique, sans chercher à éluder la réalité, laquelle s’avère difficile à saisir : quel Allemand a participé ou pas à la folie nazie? Et pourquoi ?

Sa conclusion? Son grand-père était un “MITLAUFER”… Un “suiveur” si l’on préfère, et non pas un meneur.

Très intéressant.

DERRIERE LES LIGNES ENNEMIES

Une espionne juive dans l’Allemagne nazie

Marthe Cohn

Editions Tallandier, 342 pages

Marthe Cohn, une jeune juive de Metz, avec l’avancée des troupes allemandes, quitte sa ville avec sa famille en 1940.

Ils se voient contraints de changer plusieurs fois de ville et de domicile pour échapper à l’occupant, jusqu’en 1944.

En 1944, comme elle parle couramment l’allemand, elle est recrutée par l’armée française qui l’envoie derrière les lignes allemandes pour espionner et transmettre des renseignements sur les troupes ennemies.

LE VOYAGEUR

Ulrich Alexander Boschwitz

Grasset, 335 pages

Inspiré par sa propre expérience, ou celle de ses proches, ce roman saisissant a été écrit fébrilement, en moins d’un mois, en 1938, à la suite de la Nuit de Cristal. Il a été “re-découvert”  aux Archives de la Bibliothèque nationale de Francfort, dans la section “littérature d’exil”.

Otto Silbermann est un négociant juif qui affiche une belle réussite. Marié à une aryenne, il a un fils émigré à Paris. Ce dernier tente en vain d’obtenir des visas pour ses parents. Lorsque des policiers se présentent à son domicile pour l’arrêter, il parvient à prendre la fuite. Mais où aller? Les portes se ferment une à une. En dernier recours, il réussit à obtenir une forte somme d’argent de son fondé de pouvoir. Nanti de son pécule, il cherche à fuir, en prenant le train. Un fois parti, le voilà qui change d’avis et repart dans une autre direction. Au fur et à mesure que le temps passe, ses voyages successifs lui font faire des rencontres souvent angoissantes… Petit à petit, il perd son arrogance de nanti, sa peur le domine au point de lui faire prendre des risques… Sa lucidité aiguisée par le danger s’avère atteinte. Tous ces voyages le ramènent sans fin à Berlin, SA ville. Et c’est là qu’il finira par se faire prendre, volontairement.

Ce roman d’une rare puissance est bouleversant. Ce fugitif pas toujours sympathique nous amène sans fin à la question “et moi, qu’aurais-je fait? “. L’auteur nous donne à lire toutes les pensées, tous les délires d’un homme aux abois innocent, mais juif. Cela fait de lui une proie facile…

Terrifiant et magnifique roman.

LES RACINES INTELLECTUELLES DE “MEIN KAMPF”

revue d’histoire de la Shoah, 383 pages

Ce recueil d’articles répond en partie à une question récurrente : pourquoi l’Allemagne?

En effet, on entend souvent dire qu’un bastion si avancé de la culture n’aurait pas dû devenir barbare.

Les éminents historiens qui interviennent dans cet ouvrage montrent que l’Allemagne, bien que n’étant pas le seul pays où sévissait l’antisémitisme, a tout de même produit les plus féroces antisémites, tous ces “völkish” nationalistes, racistes, eugénistes,  adeptes de la pureté de la “race” aryenne,… Paul de Lagarde, Theodor Fritsch, Guido von List, RICHARD WAGNER, Karl Lueger, Alfred Rosenberg, Dietrich Eckart… Tous ces penseurs ont inspiré, éduqué, accompagné Hitler, ce “Mitlaufer” (mouton) au verbe captivant.

Parmi ces antisémites se trouvent également des socialistes! ce sujet est peu développé, hélas, mais nous nous proposons de faire des recherches sur Internet!

Etude très sérieuse, qui remet les idées en place.

memorial de la Shoah

Main Basse sur Israël – Netanyahou et la fin du rêve sioniste

Jean Pierre Filiu

Edition : La Découverte

Soixante-dix ans après la création d’Israël, les pères fondateurs se retrouveraient-ils dans le grand récit que porte aujourd’hui Benjamin Netanyahou ? Jean-Pierre Filiu offre ici une réflexion historique sur la longue durée du sionisme et sur l’expérience de Bibi aux commandes d’Israël. Une longévité remarquable qui emprunte force détours et travers.

Selon une de nos lectrice, dans son livre J.P. Filiu décrit la carrière de B. Netanyahou comme un processus de lente régression démocratique mais l’opinion publique reste malgré tout derrière lui. Selon elle, le livre n’apporte rien de nouveau.Le livre a été publié avant les élections de septembre dernier.

B. Netanyahou a été élu mais dans l’incapacité de former un gouvernement de coalition, il a démissionné en octobre.

LA GOÛTEUSE D’HITLER

Rosella Postorino

Albin Michel, 400 pages

Ce livre est inspiré de l’histoire vraie de Margot Wölk, la dernière « goûteuse » d’Hitler.

C’est contre sa volonté que Rosa Sauer, dont le mari est sur le front de l’Est, se trouve avec 9 autres femmes pour goûter les 3 repas d’Hitler, terrorisé à l’idée qu’on attente à sa vie…..

Revue de presse

Captivant. –Le Soir

Magnifique portrait de femme. Ce roman fort et très documenté se lit d’une traite. –Le Parisien

L’auteure mêle habilement la petite histoire à la grande et signe un livre fort, captivant, humain et sensible. Inoubliable. –Version Femina

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