Editorial

Traditionnellement, cette période est l’occasion d’échanger des vœux et des souhaits de bonheur et de réussite pour l’année civile qui commence.

Le Centre MEDEM sacrifie volontiers à cette tradition et espère que cette année soit douce pour chacun d’entre vous et que nous puissions partager de nombreux moments joyeux et intéressants ensemble, au cours de nos activités.

Même si l’année qui s’avance ne semble pas particulièrement clémente.

Sur le plan national, nous assistons en effet à ce qui semble une dégradation du politique dans son sens le plus élevé, pour devenir un spectacle où le plus clinquant, le plus « bling-bling », le plus cinglant remplace la réflexion de fond et l’écoute de l’autre.
Des remises en cause du Président de la République sur des sujets comme la laïcité, le service minimum, l’immigration, les affaires étrangères apparaissent et disparaissent au gré de ce qui semble être une improvisation constante sans cacher quelque cacophonies gouvernementales comme le 14ème plan banlieue, récusé par un ministre avant même d’avoir été présenté.

Sur le plan international, la situation semble encore plus dramatique : les guerres ethniques ou claniques font flores, la prise d’otages est devenue le sport national de certains pays tout comme l’antisémitisme reste une valeur sûre pour d’autres, mille inquiétudes s’élèvent quand à la course de l’Iran vers un nucléaire militaire, le conflit du Proche-Orient est enlisé, l’Europe n’enthousiasme personne, les organismes internationaux sont impuissants ou complètement dévoyés comme le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU qui prépare un Durban 2.

Sur tous ces sujets, Le Centre MEDEM, propose une réflexion qui se tient de deux façons différentes :

La première avec les conférences-débats du mardi : nous avons, par exemple, évoqué la mascarade de Durban avec l’historienne Malka MARCOVICH et Pierre FOURNIEL, délégué Général de la LICRA. Nous organisons le 25 mars une table ronde sur l’Iran auquel nous vous convions nombreux.

La seconde en contribuant à alimenter notre site : en effet, dans la rubrique Documents > Revue de presse du site centre-medem.org, nous publions chaque mois des extraits de différents journaux, magazines revues en ligne qui semblent pertinents sur les sujets qui nous touchent. Vous pouvez participer à cette rubrique, soit en l’alimentant par des extraits de presse que vous trouvez intéressants, soit par vos commentaires.

Pour trouver des moyens d’agir dans ce monde complexe et violent, le premier levier est le partage de nos connaissances et de nos réflexions.

C’est notre fortune, il convient de la dépenser sans compter.

Meilleurs vœux et bonne année.
Le comité.

Lea Mimoun

Léa Mimoun

chantera pour vous

BARBARA

accompagnée au piano par le
talentueux
Patrick Langlade

Dix ans après la mort de la chanteuse

[…] “Léa Mimoun donne le frisson avec sa voix si proche de celle de Barbara : “J’ai grandi avec le répertoire de Barbara, je dormais avec ses vinyles. Ses mélodies classiques, proches de Chopin, me touchaient autant que sa sensibilité de femme. Je ne cherche pas à l’imiter. Ses chansons je les ai faites miennes “.
[…] Léa Mimoun a observé des têtes de post-adolescents dans les salles où elle se produit […]

Avec justesse et authenticité, Léa Mimoun s’approprie le merveilleux répertoire de Barbara et le réinvente pour le plus grand bonheur de son public toujours plus nombreux.
Tendresse, chaleur, tourment et humour seront au rendez-vous de ce concert.
Ne ratez pas cette occasion de partager avec Léa Mimoun, accompagnée au piano par Patrick Langlade, ce « moment magique », cet « instant sublime » de textes et de musique intemporels servis par une très belle voix.
Le Nouvel Observateur du 23 Novembre 2007
Sophie Delassein

Il est prudent de réserver auprès de Marie au 01 42 02 17 08 P.a.f.

La Resistance

Après notre avant première

Victimes contre boureaux

Sur France 2

Vivre libre ou mourir

Lundi 18 février à 20h50

La Résistance n’existait pas encore, et pourtant, dans tout le pays, les manifestations de colère éclataient : grèves, sabotages, manifestations patriotiques, journaux clandestins, réseaux d’évasion pour prisonniers de guerre…

Quand il fallait sauver les juifs

Mardi 19 février à 20h50

Organisations issues des communautés juives, associations caritatives de la société civile… Toutes se retrouvent confrontées à deux barbaries antisémites,

Sur France 5

Le sourd grondement d’un peuple

Vendredi 22 février 15h35

Comment les sociétés civiles réagissent-elles lorsqu’elles sont confrontées aux violences les plus extrêmes, au totalitarisme ? Occupation militaire, barbarie, crimes de masse sont destinés à écraser les individus, à briser les solidarités

La lutte armée

Vendredi 29 février 15h35

Un attentat toutes les heures ! En décembre 1943, les résistants frappent partout en France. Ce n’est pas encore le paroxysme de l’été 1944, mais l’impalpable frisson rebelle qui parcourait la France après la débâcle de 1940 a enfin pris corps.

Victimes contre boureaux

Vendredi 7 mars à 15h30
Les communautés juives vivant en France ne se sont pas laissé faire, contrairement à ce que beaucoup croient. Si les trois quarts des Juifs ont échappé à la déportation, c’est d’abord parce qu’ils ont résisté

Face à la déportation des juifs

Vendredi 14 mars à 15h30

Eté 1942. En Europe, les rafles de Juifs se multiplient. Mais en France apparaît une résistance face aux persécutions antisémites. 320 000 Juifs vivaient dans l’Hexagone en 1940.

Judéité, laïcité, citoyenneté

Disons-le d’emblée : malgré les vicissitudes de leur histoire au sein de notre pays (notamment l’antisémitisme de l’affaire Dreyfus et celui des années du nazisme), les juifs ont acquis un statut tout à fait satisfaisant et honorable, à l’égal des autres communautés confessionnelles.
Dans le paysage laïc de la France républicaine, ils peuvent concilier, sans problèmes majeurs, leur fidélité à leur foi ancestrale et leur citoyenneté.

Les décisions du Grand Sanhédrin de 1807 avaient permis de sauvegarder à la fois la judéité, la laïcité et la citoyenneté de nos ancêtres du XIXe siècle. Aujourd’hui, au nom d’une laïcité mal interprétée, certains de nos coreligionnaires présentent des exigences peu conformes à l’esprit qui animait les rédacteurs du Grand Sanhédrin.

Le Talmud lui-même avait déjà énoncé le fameux principe : Dina demalekhouta dina « La loi du royaume (de l’État) est la loi », au nom duquel le juif est tenu de se soumettre à la loi civile de son pays dans la mesure où elle ne le contraint pas à des actes immoraux (meurtre, adultère, idolâtrie).

Mais alors, comment comprendre les demandes de saisine de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde), de la part d’associations juives ? Créée en 2004, la Halde a pour mission générale, rappelons-le, de lutter contre les discriminations prohibées par la loi, de fournir toute l’information nécessaire, d’accompagner les victimes, d’identifier et de promouvoir les bonnes pratiques pour faire entrer dans les faits le principe d’égalité. Il ne semble pas a priori que les demandes de saisine enregistrées ces derniers mois, en provenance des dites associations juives, entrent vraiment dans le cadre de discriminations ou d’atteintes à la liberté.

En France, chacun peut revendiquer son identité sans oublier sa citoyenneté. Ce qui est demandé à chacun est de s’intégrer à la communauté nationale, non de s’assimiler.
Cette nuance est essentielle : elle est de nature à rassurer les membres de toutes les minorités nationales sur le fait que la République ne leur demande pas de disparaître culturellement ou religieusement, mais, tout en conservant leurs traditions, d’assumer une citoyenneté loyale et raisonnable.

C’est, nous semble-t-il, ce qu’avaient bien compris les membres du Grand Sanhédrin de 1807 ; c’est ce que certains ne semblent plus comprendre aujourd’hui, accumulant des exigences de moins en moins compatibles avec une véritable citoyenneté. Leur prise en compte par les pouvoirs publics irait à l’encontre de la laïcité française à laquelle nous sommes très attachés.

Quelques exemples recueillis dans le compte-rendu d’une visite du ministre de l’Intérieur et des Cultes, le 22 novembre dernier au Consistoire de Paris par le mensuel Information juive. Parlant des «préoccupations essentielles (…) pour la communauté juive», un des articles énonce entre autres : « la fiscalité des dons, la cacherout (…), les places dans les carrés confessionnels juifs dans les cimetières (…), le calendrier des examens pour les élèves et les étudiants juifs (…), la nourriture cachère dans les hôpitaux, les systèmes d’entrée de certains immeubles le shabbat…».

Force est de constater, face à cette énumération, que la communauté juive émet là des exigences qui sont des formes de privilèges allant bien au-delà des règles d’une laïcité bien comprise.
Si chaque minorité nationale devait s’en inspirer, il est à craindre que la vie du pays serait parcellisée et peu propice à l’intégration tant désirée par les pouvoirs publics. Faut-il rappeler, par exemple, que les carrés confessionnels dans les cimetières municipaux sont des dérogations, non un droit en soi ? Concernant les digicodes en bas des immeubles, il est inadmissible de vouloir en imposer l’arrêt le shabbat au prétexte d’une pratique orthodoxe de certains locataires juifs, et aux dépens de la sécurité et de la tranquillité du reste des occupants de ces immeubles.

On peut comprendre le désir de certains de vivre selon toutes les prescriptions de leur religion, mais ils doivent admettre que ce n’est pas possible dans un pays dont les coutumes et les lois ont été façonnées par des siècles de chrétienté et qui, de surcroît, se propose d’intégrer tant d’autres minorités. Il y a deux siècles, en acceptant la devise de la République Liberté, égalité, fraternité les juifs ont aussi implicitement accepté cette autre devise : Judéité, laïcité, citoyenneté

Le Figaro. 18/01/2008

Deux femmes d’honneur

En proposant, lors de sa visite en Inde, à Taslima Nasreen de se rendre à Paris pour recevoir le prix Simone-de-Beauvoir, le président de la République a souhaité exprimer à l’écrivaine bangladaise menacée de mort par les intégristes islamistes le soutien de la France dans son combat pour la liberté. Il a voulu lui dire que la France éternelle, celle de 1789, de Hugo, de De Gaulle, de Simone Veil, celle de Ni putes ni soumises, l’a entendue. La parole présidentielle est celle de tout un peuple qui s’est promis de porter, par-delà les océans, ces mots qui tonnent, jusqu’à donner le vertige aux peuples étrangers : “liberté, égalité, fraternité”.

Le crime de Taslima Nasreen est d’avoir écrit que l’islam n’autorisait pas l’humiliation des femmes : “Faut-il que je paie le crime d’être née femme ?” Elle paie si cher, Taslima, obligée de quitter son pays en 1994 ; contrainte à une longue errance qui l’a conduite en Inde, où, en 2007, sa tête a été mise à prix pour 500 000 roupies par un groupe islamiste. Nous aurions voulu la rencontrer pendant notre séjour indien pour lui dire que la France ne l’oubliait pas. Elle se rappelle à notre souvenir au moment où Benazir Bhutto est assassinée. Cet assassinat et l’errance de Taslima Nasreen nous rappellent que le pire peut côtoyer le meilleur, l’obscurantisme cohabiter avec la modernité. Pour l’avenir, selon qu’il tranchera dans un sens ou dans l’autre, le sous-continent indien sera un exemple ou un cauchemar pour le monde.

11 septembre 2007 : Ayaan Hirsi Ali est à Paris.

Notre rencontre tombe le jour anniversaire des attentats de New York. Ex-députée néerlandaise d’origine somalienne, elle arrive en France, chargée du poids d’une fatwa qui l’a conduite à se réfugier aux Etats-Unis. Qu’elles soient du Bangladesh ou de la Somalie, les combattantes de la liberté se ressemblent toutes : chez Ayaan comme chez Taslima, la douceur cohabite avec la hardiesse. Taslima dit ces mots froids : “Femmes, libérez-vous des morsures de la peur pour vous tenir debout, droites et fières !” Ayaan, elle, a l’audace de celles qui jouent leur va-tout, quand elle dit : “Vous pouvez exprimer votre opinion, mais votre tête sera coupée. Vivre dans une démocratie ne change rien à l’affaire, alors que c’est rien de moins que la liberté d’expression qui se joue !”

Elle vous enchante, Ayaan, autant qu’elle vous glace. Sa vie a été aussi mise à prix : elle a participé à l’écriture d’un scénario de film sur l’islam. L’auteur du film, Theo van Gogh, a été assassiné en plein jour, en 2004, de huit coups de revolver. Son meurtrier a égorgé son cadavre et lui a planté deux couteaux dans la poitrine. Dessus, une fatwa adressée à Ayaan Hirsi Ali.
Taslima, Ayaan, deux femmes pourchassées pour avoir osé dire leur vérité de femmes libres. On peut les trouver dérangeantes, excessives, sulfureuses. On n’est pas obligé d’être en accord avec leurs propos, mais elles doivent avoir le droit de les tenir. Toutes les fureurs qu’elles portent en elles doivent être entendues par le pays des droits de l’homme. Le long sanglot de ces Voltaire des temps modernes est celui de femmes qui ne veulent pas vivre à genoux. Leur détresse est notre humiliation. Leur désarroi, notre remords.

Ayaan et Taslima, que tout sépare mais que les fatwas rapprochent, en ont toutes les deux appelé au même pays, la France. Pourquoi nous ? Parce qu’un jour nous avons eu l’audace inouïe de nous proclamer pays des droits de l’homme. Parce qu’elles ont entendu Nicolas Sarkozy prendre le parti des femmes opprimées dans le monde et annoncer courageusement que, désormais, elles étaient françaises. Parce qu’être français, c’est pour elles, être libre.
C’est à elles que les femmes françaises ont décidé d’attribuer le prix Simone-de-Beauvoir. Mais Ayaan veut aussi que nous l’aidions à assurer sa sécurité où qu’elle soit. Taslima, elle, souhaite que l’Inde lui accorde la nationalité indienne. Ce que veulent ces deux femmes, c’est la liberté de circuler sans risquer d’être tuées.

Face à leurs requêtes, certains peuvent choisir le parti de la prudence, de peur de provoquer les fondamentalistes. Alors que la main des terroristes ne tremble pas quand il s’agit de tuer, le monde occidental, lui, tremblerait-il désormais quand il s’agit d’affirmer ses valeurs de liberté, de justice, de solidarité ? C’est pourquoi je propose que l’Europe fasse de l’égalité des droits entre les hommes et les femmes une priorité partout dans le monde, y compris les pays musulmans.

Si nous abdiquons, nous risquons de nous trouver dans une situation où ce sont ces femmes isolées, venues de pays supposés étrangers à nos valeurs, qui les défendront le mieux. Ne pas les soutenir, c’est négliger nos valeurs. Les oublier, c’est oublier qui nous sommes. Nous sommes à un tournant civilisationnel. Ce sera eux ou nous. Taslima et Ayaan l’ont compris. Il est encore temps de les sauver. Et, de nous sauver nous-mêmes.

110 ans du BUND

LE BUND A 110 ANS

En octobre 1897 13 militants socialistes juifs (dont 2 femmes) réunis dans un faubourg de Vilna fondèrent

“Der Allgemeiner Yiddisher Arbeiterbund in Russland un Poyln” appelé plus tard “Der Yiddisher Arbeiter Bund”, le Bund ouvrier juif,

mouvement politique, culturel, diasporique, laïque, internationaliste et yiddishiste.

fondation
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A l’occasion de cet anniversaire, le Centre Medem- Arbeter Ring qui en est l’un des héritiers direct propose de nous rencontrer autour d’un verre de l’amitié, en compagnie d’historiens, de militants, de sympathisants et de ses nombreux amis qui souhaitent s’informer ou témoigner de la façon dont les valeurs du Bund sont toujours vivantes.

historique

Le nombre de places étant limité, merci de vous inscrire au secrétariat
auprès de Marie tel : 01 42 02 17 08

Boycotte du salon du livre de Turin

A propos du boycotte du salon du livre de Turin

Refuser de lire un livre, boycotter un ensemble d’écrivains, marquer sa désapprobation d’une politique en pénalisant les écrivains de cet Etat, cela a-t-il un sens ? C’est la question que je pose en ces jours où une association d’écrivains arabes a lancé une campagne de boycotte du prochain salon du livre de Turin qui aura lieu à partir du 8 mai du fait que l’invité d’honneur de cette foire sont les écrivains israéliens. Le texte dit « qu’on ne peut pas célébrer un Etat qui pratique l’homicide et la destruction ». Tariq Ramadan, l’intellectuel musulman, ancien conseiller de Tony Blair, est entré dans la polémique pour affirmer qu’il est « clair qu’on ne peut rien approuver de ce qui vient d’Israël » (La Repubblica 2 février 2008).

Le Parti communiste italien a demandé d’étendre l’invitation aux écrivains Palestiniens. Le directeur du salon, Ernesto Ferrero a assuré que le salon « garantira pleine dignité à la culture palestinienne ». En dehors de ces prises de position, je refuse, quant à moi de tout confondre et tout mélanger.

Je suis en train de lire le dernier roman d’Amos Oz « Vie et mort en quatre rimes », et j’ai mis de côté celui d’Amir Gutfreund « Les gens indispensables ne meurent jamais » pour le lire aux prochaines vacances car il fait 500 pages. Si je comprends bien la logique de ceux qui lancent une campagne de boycotte du prochain salon du livre de Turin, il faudra que je jette ces deux livres et peut-être même les brûler. Pourquoi ? Parce qu’ils sont écrits par des Israéliens. Du même coup, le public israélien devrait lui aussi jeter mes livres traduits en hébreu et les condamner à l’exil. On pourrait continuer ce petit jeu et empêcher par exemple que les poèmes du palestinien Mahmoud Darwish ne rentrent pas dans les librairies et maisons israéliennes. Ce serait une guerre contre la culture d’où qu’elle vienne. Cela est contraire à l’esprit de la civilisation arabe et ne pourrait produire que des catastrophes, élever le mur de l’incompréhension, de la peur et de la haine.

Il faut bien distinguer les choses : la politique d’un État n’est pas assimilable à la production littéraire des écrivains de cet État. Je suis parmi ceux qui critiquent le plus durement la politique israélienne d’occupation et je ne confonds pas M. Olmert avec M. Oz, M. Grossman ou M. Gutfreund. Je peux aussi ne pas aimer tel ou tel ouvrage. Cela n’a rien à voir avec le pays d’origine de celui qui l’a écrit.

Boycotter le salon du livre de Turin n’a pas de sens. Un peu partout dans le monde des écrivains israéliens rencontrent des écrivains arabes et palestiniens. Leur dialogue n’est pas celui de leurs Etats. Ils discutent, peuvent même se disputer mais le boycotte est un aveu de faiblesse, une façon de généraliser le fanatisme et même de donner à l’Etat d’Israël des arguments pour se présenter non pas comme occupant des territoires palestiniens, mais comme victime.

Les Palestiniens n’ont pas besoin de cette petite guerre qui n’arrangera pas leurs espérances. Le peuple palestinien a besoin de justice, a besoin d’un Etat viable, dans des frontières sûres et reconnues. Il n’a que faire de ce boycotte au moment où des négociations ont lieu, même si elles n’aboutissent pas à des résultats satisfaisants. Il faut en finir avec ces réflexes d’un autre âge et admettre qu’il y aura deux États, côte à côte, Israël et la Palestine. Tôt ou tard, ces deux peuples parviendront à une coexistence. Ils sont tous les deux fatigués et veulent vivre dans la paix. Les attaques quasi quotidiennes des populations de Gaza sont inadmissibles, car ce sont des familles qui sont pénalisées à cause de leurs dirigeants. En tout cas ce n’est pas le boycotte du prochain salon du livre de Turin qui ouvrira le chemin de la paix et de la réconciliation. Critiquer la politique d’un État. Critiquer un roman sur le plan littéraire. Tout cela est possible. Mais surtout ne pas confondre les deux choses et susciter par là davantage d’incompréhension. Cela ne servira que les intérêts des marchands d’armes.

Soirée des 30-50 ans

En ce froid mois de janvier, venez vous réchauffer

dans la grande salle du Centre Medem.

Musique Klezmer, « glouz taî »
(verre de thé) et gâteaux à gogo.

Animation assurée par les dynamiques klezmers
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« Shtetl Stompers »

et leur invité exceptionnel Alexis Kune.

Ambiance dansante et chaleur assurées. P.a.f.

LAICITE




Première question

CINQ QUESTIONS À NICOLAS SARKOZY

 

 

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Première question. Les humanistes athées doivent-ils jouir des mêmes droits que les croyants ?

Dans votre livre sur la République et les religions, vous accordez un privilège à l'option religieuse. Selon vous, en dehors de celle-ci, il ne serait pas possible de donner à la conduite de l'existence les repères de sens dont elle a besoin. Sartre l'athée et Camus l'agnostique devaient donc être perdus devant les problèmes de la vie...

Et Bertrand Russel, qui écrivit "Pourquoi je ne suis pas chrétien" devait se trouver démuni devant les questions éthiques. Ne pensez-vous pas que celui qui ne croit pas au ciel a de quoi être blessé par votre préférence ? Honoré d'Estienne d'Orves, catholique résistant, méritait-il davantage de considération que Gabriel Péri, athée résistant ? Tous les deux tombèrent sous les balles des nazis. Vous connaissez le mot du poète. "Celui qui croyait au ciel, celui qui n'y croyait pas, qu'importe comment s'appelle cette clarté sur leurs pas, que l'un fût de la chapelle et l'autre s'y dérobât " (Louis Aragon, La Rose et le Réséda).

 

Deuxième question. Quelle égalité s'agit-il de promouvoir ?

Vous dites vouloir l'égalité des religions entre elles, et pour cela vous envisagez de construire sur fonds publics des lieux de culte, notamment pour permettre aux citoyens de confession musulmane de compenser leur déficit en la matière par rapport aux catholiques, qui jouissent d'un usufruit gratuit des églises construites avant 1905, même si cet usufruit, par "affectation spéciale" est limité aux seuls moments de pratique religieuse.

Vous ne demandez pas le même financement pour des maisons de la libre-pensée ou des temples maçonniques. Êtes-vous donc partisan de la discrimination entre les citoyens selon les options spirituelles dans lesquelles ils se reconnaissent ?

L'égalité républicaine se réduirait-elle pour vous à l'égalité des divers croyants, à l'exclusion des humanistes athées ou agnostiques ? Parler en l'occurrence de "toilettage" de la loi de séparation de 1905 est un euphémisme trompeur. Rétablir le financement public des cultes, c'est raturer un des deux articles de cette loi, inscrits sous la rubrique "Principes". "La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte"

 

Avouez que renoncer à un principe sur deux, c'est plus que "toiletter" la loi. C'est l'abolir.

 

On ne peut en l'occurrence assimiler l'entretien du patrimoine historique et artistique constitué par les édifices du culte légués par l'histoire, et laissés en usufruit partiel aux associations cultuelles, à une règle de financement. Dans un état de droit, aucune loi n'est rétroactive. Depuis le premier Janvier 1906, toute construction d'un nouveau lieu de culte est à la charge des seuls fidèles, quelle que soit la religion en jeu. Telle est la règle, et les entorses trop fréquentes qui la bafouent ne sauraient pas plus faire jurisprudence que le fait de griller les feux rouges n'appelle leur abolition.

 

Troisième question. Quelle priorité pour les pouvoirs publics ?

Le rapport Machelon, qui a votre sympathie, utilise le concept de liberté de religion, pour permettre le glissement du "libre exercice des cultes", garanti par le premier article de la loi, à la nécessité supposée de financer les cultes. Joli jeu de mots et vrai tour de passe-passe, qui risque de tromper. En République, seul l'intérêt général, commun à tous, portant sur les biens et besoins de portée universelle, mérite financement public.

 

Or la religion n'est pas un service public, comme l'instruction, la culture ou la santé. Elle n'engage en effet que les fidèles, c'est-à-dire une partie des citoyens seulement.

 

La puissance publique, dont les fonds résultent des impôts payés par des athées autant que par des croyants, n'a donc pas à financer les cultes, pas plus qu'elle n'aurait à financer la diffusion de l'athéisme. En convenez-vous ? La question est grave, à l'heure où l'ultralibéralisme économique entend dessaisir l'État de son rôle social, et soumettre à la loi du marché les services publics préalablement privatisés.

L'État, jugé trop pauvre pour assurer les finalités sociales des services publics qui concernent tous les citoyens (éducation, culture, santé, accès à l'énergie et à la communication) serait donc assez riche pour financer l'option religieuse qui pourtant n'en concerne que certains. Voulez-vous sacrifier l'universel sur l'autel du particulier ? Nos hôpitaux manquent de moyens, notre école publique également. Révoltant paradoxe.

 

Briser la laïcité en même temps que les services publics. Et faire passer cette régression par le supplément d'âme d'un monde sans âme, alliant le baume communautariste et le privilège public des religions. Jean Jaurès et Aristide Briand, préparant la Loi de séparation de 1905, savaient qu'en supprimant le budget des cultes ils ne faisaient pas qu'abolir un privilège : ils transféraient à l'État des ressources publiques bienvenues pour ce qui est d'intérêt commun. Les retraites ouvrières, en gestation, n'allaient-elles pas être attribuées aux travailleurs croyants comme aux athées, permettant aux premiers de se cotiser plus aisément pour financer eux-mêmes leurs lieux de culte ?

 

Quatrième question. Quelle conception de la lutte contre le fanatisme ?

Vous dites vouloir éviter les interventions étrangères, notamment les financements venus de pays peu respectueux des valeurs républicaines et démocratiques. Et vous affirmez qu'en payant on pourra mieux contrôler. Fausse évidence. Car enfin quel lien juridique y a-t-il entre le financement et un droit de regard sur les propos des responsables religieux dans les lieux de culte ?

Il ne peut exister que par le rétablissement d'une démarche concordataire, c'est-à-dire anti-laïque. Napoléon avait fait le concordat de 1801 en assortissant le financement public des cultes d'allégeances obligées des autorités religieuses à son pouvoir. Le catéchisme impérial de 1807 a radicalisé ce système assez humiliant pour les croyants, puisqu'en somme il les achète. Dans une république laïque, il ne saurait y avoir d'allégeance assortie de privilège. Veut-on imposer une orthodoxie aux religions ? Qui ne voit le caractère infaisable, et irrecevable d'une telle perspective ?

Seule une loi commune à tous doit dire le droit. Elle proscrit par exemple toute violence, toute discrimination entre les sexes, toute entrave à l'exercice de la médecine. Un pasteur ou un curé incitant des commandos à perturber les interruptions volontaires de grossesse, comme on l'a vu en Amérique, tombe sous le coup de cette loi. De même un imam qui inciterait à battre la femme adultère.

Bref, il n'est pas nécessaire de payer pour contrôler. Seul vaut l'État de droit. Et ce qui importe n'est pas la nationalité d'un imam, mais son respect des lois républicaines.

Ne nous trompons pas de combat. Ce n'est pas l'étranger comme tel qui pose problème à la République, mais celui qui entend s'affranchir de la loi commune pour lui substituer sa loi particulière, qu'elle soit religieuse ou coutumière.

 

 

Cinquième question. Que reste-t-il de la laïcité, et de la République, si on rétablit un financement discriminatoire ?

La République n'est pas une juxtaposition de communautés particulières. Il n'y a pas en France cinq millions de "musulmans", mais cinq millions de personnes issues de l'immigration maghrébine ou turque, très diverses dans leurs choix spirituels. Une enquête récente dont Le Monde s'est fait l'écho, précise que seule une petite minorité de cette population fréquente la mosquée, la majeure partie faisant de la religion une affaire privée, ou ne se référant à l'Islam que par une sorte de solidarité imaginaire. Dès lors, la République doit-elle renoncer à la laïcité pour satisfaire cette minorité, ou concentrer les deniers publics sur la redistribution par les services publics, la gratuité des soins, le logement social, ou la lutte contre l'échec scolaire, qui concernent à l'évidence tous les hommes, sans distinction de nationalité ou de choix spirituels ?

N'est-ce pas le devoir des hommes politiques d'expliquer qu'en assurant des missions de service public profitables aux croyants comme aux athées, et en luttant contre tous les types de discrimination, que l'État facilite aux uns et aux autres le financement volontaire de la conviction de leur choix ? Il est évidemment essentiel, dans cet esprit, de permettre aux croyants l'acquisition des terrains qu'ils financeront, et toute discrimination foncière doit être combattue. Le prétexte invoqué pour l'abolition de la Loi de séparation laïque de 1905 -car il s'agit bien de cela- est l'aide à apporter aux citoyens de confession musulmane. Or la promotion du bien commun à tous, et non la prise en charge publique de la religion, est la meilleure réponse au problème soulevé. C'est aussi la seule légitime.

 

On sait bien qu'en république on ne peut accorder des droits aux uns sans les étendre à tous. La construction de mosquées sur fonds publics appellerait aussitôt celle de nouvelles églises, de temples, ou de synagogues.

 

Et si l'on brouille la frontière pourtant nette entre le culturel et le cultuel, comme le propose le rapport Machelon, on parachève le démantèlement de la loi.

 

Est culturel ce qui peut intéresser tous les hommes, comme l'art religieux ou les mythologies, qu'éclaire une approche laïque. Est cultuel ce qui réfère à la croyance religieuse de certains. Les mots ont donc un sens, et tout glissement visant à confondre ce qui est distinct est une malhonnêteté.

Cela s'appelle du détournement des deniers publics. Veut-on obtenir le rétablissement du financement indirect du culte en utilisant le financement direct de la culture ? Ce tour de passe-passe relèverait de la sanction légitime de la Cour des Comptes, comme la discrimination donnant plus de droits aux croyants qu'aux athées appellerait un recours devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme.

Nulle polémique, Monsieur le Ministre, dans de telles interrogations, mais l'inquiétude vive d'un républicain qui n'est pas décidé à admettre de nouveaux empiètements programmés contre la laïcité. À l'heure où les communes de France croulent déjà sous des charges indues, comme les nouvelles obligations à l'égard des écoles privées, l'abolition des lois laïques serait très mal vécue. À l'heure où certains parlent de rétablir le délit de blasphème, à contre-courant des grandes conquêtes de l'esprit de liberté, la conscience citoyenne ne peut que s'insurger.

Rassurez-nous, Monsieur le Ministre. Dites clairement qu'il n'est nullement dans votre programme de dresser certains citoyens contre d'autres en donnant aux uns des privilèges qui n'avouent pas leur nom, et qui spolient le bien public tout en stimulant le communautarisme. Et ne dissimulez pas ce projet de délaïcisation sous la rhétorique ressassée des "évolutions nécessaires". Vous savez bien que la seule question qui vaille n'est pas de savoir si une chose est ancienne ou nouvelle, mais si elle est juste ou non. En bref ne brisez pas ce que bien des peuples nous envient. Car l'idéal laïque est un vecteur d'égalité comme de liberté, une source de fraternité. Pourvu qu'il aille de pair avec la justice sociale, il répond au grand défi de notre époque : partager un monde commun à tous.

 

Henri Pena Ruiz

conférencier et professeur de philosophie à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris.